BANQUE MONDIALE : Croissance du PIB par habitant à 4,0 % au Maroc
Du fait de sa conjoncture socioéconomique à long terme et de ses systèmes de santé publique sous-financés, la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) n’était guère préparée à répondre à la COVID-19. Cette situation contribue de fait à une reprise timide et inégale alors que la région peine à s’extraire de la pandémie.
Le dernier Bulletin d’information économique de la région MENA intitulé « Excès de confiance : Comment des défaillances économiques et sanitaires ont laissé la région MENA démunie face à la COVID-19 », décrit en détail les contraintes qui pesaient sur les systèmes de santé de la région avant l’avènement de la pandémie, notamment en raison d’une forte masse salariale publique détournant des investissements qui auraient pu être affectés à des services sociaux tels que la santé. Le rapport qualifie ce symptôme de « myopie budgétaire ».
De manière générale, le coût cumulé estimatif de la pandémie en termes de pertes de produit intérieur brut (PIB) dans la région d’ici à la fin de l’année en cours s’élève à près de 200 milliards de dollars. Ce coût est calculé par rapport au niveau que le PIB régional aurait atteint en l’absence de pandémie. D’après le rapport, le PIB régional s’est contracté de 3,8 % en 2020 et devrait croître de 2,8 % en 2021.
« L’impact désastreux de la pandémie sur l’activité économique régionale est un rappel douloureux du lien inextricable qui existe entre le développement économique et la santé publique. Nous sommes confrontés à une triste réalité : les systèmes de santé de la région MENA, qui étaient considérés comme relativement développés, se sont effondrés face à la crise », a affirmé Ferid Belhaj, vice-président de la Banque mondiale pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord. « À l’avenir, il va falloir mettre davantage l’accent sur le renforcement des fonctions essentielles de santé publique et utiliser le pouvoir des données de santé et des systèmes de prévention sanitaire comme levier pour accélérer la reprise dans la région et se préparer aux futures urgences de santé publique que pourraient générer de nouvelles pandémies, des catastrophes d’origine climatique et même des conflits sociaux. »
En ce qui concerne le PIB par habitant, qui sert à mesurer le niveau de vie d’une population, le rapport prévoit pour 2021 une reprise timide et inégale dans toute la région MENA. En effet, d’après les prévisions, le PIB par habitant de la région ne devrait augmenter que de 1,1 % en 2021, après avoir diminué de 5,4 % en 2020. Vers fin 2021, il sera toujours inférieur de 4,3 % au taux enregistré en 2019. En 2021, 13 pays de la région sur 16 auront un niveau de vie inférieur à ce qu’ils connaissaient avant la pandémie. En outre, le taux de croissance du PIB par habitant ne sera pas le même d’un pays à l’autre : il variera de -9,8 % au Liban — plongé dans une profonde récession — à 4,0 % au Maroc. La reprise dépendra aussi du déploiement rapide et équitable des vaccins, particulièrement au moment où apparaissent de nouveaux variants du virus. L’incertitude politique dans certains pays et le rythme de relance de l’activité touristique dans d’autres présentent aussi des risques pour la croissance.
« Les deux dernières années ont montré la nécessité d’endiguer la pandémie non seulement pour sauver des vies, mais aussi pour accélérer la reprise économique, qui est aujourd’hui précaire et inégale à travers la région MENA. Des systèmes de santé sous pression et la lenteur des vaccinations dans de nombreux pays de la région à revenu faible ou intermédiaire posent des risques baissiers », a déclaré Roberta Gatti, économiste en chef de la Banque mondiale pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord.
La région MENA est l’une des seules du monde en développement où la part des dépenses publiques dans le PIB a augmenté pendant la décennie qui a précédé la pandémie, passant de 16 % à 18 % entre 2009 et 2019. Les secteurs publics pléthoriques et la dette publique considérable qui en ont résulté ont détourné des ressources qui auraient pu être investies dans la santé publique, ce qui, par ricochet, a réorienté certaines dépenses de santé vers les particuliers, comme en atteste le niveau anormalement élevé des dépenses à la charge des patients. Un autre symptôme de systèmes de santé publique sous pression a été la faible part des dépenses consacrées à la santé préventive, une situation qui a contribué aux taux élevés de maladies transmissibles et non transmissibles dans la région par rapport aux autres régions comparables. De plus, la jeunesse des habitants de la région a créé l’illusion statistique d’une population en bonne santé, faisant peut-être croire qu’il n’était guère urgent d’investir dans la préparation à des urgences sanitaires.
Le rapport révèle que non seulement les systèmes de santé publique de la région n’étaient pas suffisamment outillés pour absorber le choc de la pandémie, mais aussi que les autorités avaient auparavant peint une image excessivement optimiste de l’état de préparation de ces systèmes dans leurs autoévaluations. C’est ce que le rapport désigne par « excès de confiance ».
Le faible niveau de collecte et d’utilisation des données peut avoir contribué sensiblement à cette confiance exagérée. Le rapport fait valoir qu’une plus grande transparence des données de santé publique peut aider les pays non seulement à répondre aux besoins chroniques de soins de santé, mais aussi à se préparer à de futures urgences sanitaires. Il conclut à la nécessité de remédier de toute urgence au sous-investissement qui caractérise actuellement les systèmes de santé en affectant prioritairement des ressources aux fonctions essentielles de santé publique dans les budgets sectoriels des États.