ExpertsFlash

COVID 19: Tout savoir sur l’impact sur les droits des transports de marchandises au Maroc

 

Le point de vue des experts de l’AMLOG Sous la direction du Professeur Mustapha EL KHAYAT-Président de l’AMLOG

 

 

 

 

 

Le secteur de la logistique est impacté directement puisque les chaînes logistiques globales conteneurisées sont paralysées en amont en Chine source d’approvisionnement mondiale. La situation s’aggrave avec les fermetures des frontières des pays européens voisins et la décision du président américain. Le risque est grand et la dépendance des approvisionnements du Maroc est à prendre avec précaution.La supply chain globale à laquelle est insérée l’économie marocaine est paralysée et tous les chaînons de cette chaîne sont en crise profonde. La globalisation a montré encore ses limites et ses failles.
Que faire ? A crise profonde et inattendue il faut des réponses intelligentes et rapides en utilisant la logistique comme un des moyens pour maîtriser la situation. Les flux de marchandises au niveau du marché intérieur et du commerce international sont le fait des divers modes de transport et d’organisateurs de chaines logistiques internationales par les commissionnaires du transport. Ces opérateurs de transport et de chaines logistiques se trouvent dans des situations de crises, de perturbations des trafics et d’impossibilité à accomplir leurs missions à savoir d’amener la marchandise à sa destination finale. C’est cette question de phénomènes imprévisibles, insurmontables que subissent ces opérateurs dans leurs relations avec leurs clients chargeurs. Quelle est leur responsabilité du fait du CODIV 19 ? Peuvent-ils invoquer le cas de force majeur ?

Les juristes experts de l’AMLOG essaient de répondre à ces questions en fonction du mode transport et aussi au niveau du commissionnaire du transport.

 

I- Les impacts du COVID 19 sur l’exécution des obligations du transporteur routier de marchandises

NAJIB BEN HADDOU ENSEIGNANT CHERCHEUR

 

Au Maroc, la pandémie de COVID 19, a eu un impact profond sur l’activité économique, caractérisé notamment par la suspension  de l’activité de plusieurs secteurs de l’économie, soit à travers des décisions des pouvoirs publics, soit dans le cadre de mesures préventives volontaires prises dans le cadre de la protection contre la contamination.
Certes, le secteur du transport routier de marchandises, à l’instar d’autres secteurs considérés comme secteurs vitaux, a été épargné de la décision d’interdiction d’exercer décrétée par des textes juridiques(1), mais la réalité du terrain, nous a permis de constater l’existence de certaines contraintes constituant des limites à la liberté de manœuvre pour les professionnels du secteur de transport.
Parmi ces contraintes, la fermeture de certaines unités de production ou de prestations de services dont la continuité de l’activité est nécessaire pour le fonctionnement des entreprises de transport. Nous citons entre autres, la décision des pouvoirs publics, de la fermeture des centres de visite technique(2). Ainsi, les camions dont l’arrivée à terme de la validité de l’attestation de contrôle technique coïncide avec le mois de mars et dont la passation du contrôle technique a été programmée dans ce mois, se sont vus dans l’impossibilité de circuler, faute d’attestation de visite technique (l’attestation de visite technique est obligatoire pour circuler, en vertu de la loi 52-05 relative au code de la route).
On peut faire référence aussi à la fermeture de certains centres de pneumatique et de prestations connexes. Un transporteur ayant programmé le renouvellement des pneus de son camion, suite à l’arrivée à terme de leur durée de vie, ne pouvait pas le faire dans ce cas (la conduite de véhicules avec des pneus non valables, est une infraction sanctionné par les dispositions de la loi 52-05 relative au code de la route).


(1) Décret – loi 2.20.292 du 22 mars 2020 relatif à l’état d’urgence sanitaire
Décret n° 2.20.293 instaurant l’état d’urgence sanitaire le vendredi 20 mars à 18h, jusqu’au 20 avril 2020 à 18h
Décret 2.20.330 portant prolongation de l’état d’urgence jusqu’au 20 mai 2020 à 18h
(2) Communiqué n°3 de l’Agence Nationale de la Sécurité Routière (ANSR)


Ces difficultés, mettront le transporteur dans une situation d’impossibilité d’exécuter ses obligations contractuelles, à savoir, le déplacement et la livraison des marchandises dans les délais prévus par le contrat, ou les délais raisonnables. Il devra donc, faire face aux réclamations des ayants droit à la marchandise et voir en conséquence, sa responsabilité établie.
Ceci dit, est ce que le transporteur pourra rejeter sa responsabilité pour inexécution ou mauvaise exécution, en invoquant la force majeure ? Avant de répondre à cette question, il serait utile de mettre en exergue, les traits spécifiques de cette responsabilité.
-Les caractéristiques de la responsabilité, du transporteur routier de marchandises L’obligation essentielle du transporteur dans un contrat de transport, est de déplacer les marchandises à lui remises par l’expéditeur et de les livrer au destinataire dans l’état dans lequel il les a reçues (3). Il est tenu également de les livrer dans les délais prévus par le contrat ou dans les délais raisonnables(4).
Le fait pour le transporteur de ne pas exécuter les obligations ci-dessus citées, implique automatiquement sa responsabilité contractuelle, étant donné que sa responsabilité est présumée. On parle alors, de présomption de responsabilité, de responsabilité de plein droit ou de responsabilité objective(5). Assumer une responsabilité de cette lourdeur, émane de la qualification de l’obligation du transporteur, en obligation de résultat.
Toutefois, face à ce fardeau de la responsabilité (présumée) mise à la charge du transporteur dans un contrat de transport, les règles de droit lui permettent de dégager sa responsabilité, en justifiant l’inexécution ou le retard dans l’exécution, par des causes d’exonération de responsabilité prévues par la loi.
Le code de commerce marocain, dans son article 459 décharge le transporteur de toute responsabilité lorsqu’il prouve que l’inexécution est due à la force majeure ou au cas fortuit. Dans l’article 457, Il le décharge aussi de la responsabilité pour retard, s’il prouve que ledit retard est causé par un fortuit ou de force majeure. Dans tous les cas, la responsabilité de tout débiteur, pour inexécution de ses obligations est prévue par l’article 269 du code des obligations et contrats (DOC).
En transport international, la convention CMR dans son article 17, prévoit le désengagement de la responsabilité du transporteur, lorsqu’il s’agit de circonstances que le transporteur ne pouvait pas éviter et aux conséquences desquelles il ne pouvait pas obvier.


(3) Article 443 du code de commerce pour le transport interne. Pour le transport international, on peut déduire les obligations du transporteur, à travers les renseignements mentionnés sur la feuille de route prévue par l’article 6 de la Convention relative au contrat de transport international de marchandises par route (CMR) conclue à Genève le 19 mai 1956.
(4) Article 456 du code de commerce
(5) Articles 457 et 458 du code de commerce.
Article 17-2 de la convention relative au contrat de transport international de marchandises par route (CMR)


-Peut-on considérer le COVID 19 comme force majeure exonérant le transporteur de la responsabilité contractuelle ? Le réflexe d’un juriste, s’achemine automatiquement vers la recherche des éléments constitutifs de la force majeure, prévue par le code des obligations et contrats (DOC), notamment les articles 268 et 269. Il s’agit d’éléments déduits par la doctrine et la jurisprudence, à travers ces deux articles, à savoir le triptyque caractérisant la force majeure : l’imprévisibilité, l’irrésistibilité et l’extériorité. Toutefois, si l’adaptation des éléments de la force majeur à certains cas (tremblement de terre, guerre, invasion de l’ennemi…) ne posera pas de difficulté, la situation n’est pas toujours aisée pour d’autres cas. A titre d’exemple la pandémie de COVID 19, en tant qu’événement inédit, n’a pas eu l’unanimité pour être qualifiée en cas de force majeur. La divergence des interprétations, parvient d’une part, du fait de l’opposition et la confrontation des intérêts des protagonistes, en ces circonstances et d’autre part, du fait de l’absence -jusqu’à présent- de jurisprudence dans ce domaine. Les tribunaux n’ont pas encore eu l’occasion de juger d’événements de l’ampleur du COVID-19.
Face à cette situation ambigüe, on est en droit d’analyser les choses autrement. Ceci dit, il est constaté d’une manière claire, que ce n’est pas la pandémie du Corona Virus en elle-même qui pose problème, ce sont plutôt, les circonstances impliquées par les mesures décrétées par les pouvoirs publics pour endiguer la pandémie, qui sont à l’origine des difficultés auxquelles se sont confrontés les transporteurs : déclaration d’état d’urgence sanitaire, décision de fermeture des centres de visite technique, la suspension de certaines activités liées au transport (pièces de rechange, centre de pneumatique et prestations connexes…) . Ces mesures prises par les pouvoirs publics, seront qualifiées de « fait du prince »
Définition de la notion de « Fait du prince ».
Le fait du prince, est prévu par le Dahir des obligations et contrats dans l’article 269. Après avoir définit la force majeure comme, tout fait que l’homme ne peut prévenir et qui rend impossible l’exécution de l’obligation, cet article cite parmi les exemples énumérés, « le fait du prince ».
Le « Fait du prince » est donc un événement qualifié de force majeure, dont l’origine est une décision des pouvoirs publics. Il est fait référence au fait du prince «.فعل السلطة » aux articles 269 relatif à la force majeur, 546 relatif à l’exonération du vendeur, de la garantie dans un contrat de vente et 651relatif au louage des choses. Le fait du prince, est définit par la jurisprudence, comme toute action légitime et imprévisible d’une administration tierce entrainant des dommages à la situation financière de l’entreprise(6).
De notre part, il s’avère, à travers cette analyse, que le transporteur aura la possibilité de s’exonérer de sa responsabilité pour inexécution ou pour retard dans l’exécution, en évoquant les circonstances impliquées par la pandémie de COVID 19, en tant que « fait de prince » ayant les caractéristiques de force majeure, matérialisée par les mesures décrétées par le gouvernement marocain dans le cadre de la lutte contre la propagation de l’épidémie.


(6) suite à l’entrée en vigueur de la loi 77-15 relative à l’interdiction de la fabrication, de l’importation, de l’exportation, de la commercialisation et de l’utilisation des sacs en matières plastiques, une société ayant pour activité la production des sacs en plastique, était contrainte de mettre fin à son activité et de licencier l’ensemble des salariés. L’un des salariés a introduit une action en justice contre la société, réclamant des indemnités pour licenciement abusif. La cour de cassation avait décidé que le licenciement des salariés est survenu, non pas par la volonté de l’employeur, mais plutôt à cause de l’interdiction par le les pouvoirs publics, de la production des sacs en plastique et que cette mesure est qualifié de « fait du prince » (Arrêt de la cour de cassation n°285 du 27 mars 2018)


Questions utiles

Peut-on insérer dans le contrat une clause de non responsabilité ?
Non, il n’est pas possible de le faire, les règles régissant la responsabilité du transporteur étant des règles impératives auxquelles on ne peut pas déroger. En transport interne, le code de commerce dispose dans son article 457 que toute stipulation de non garantie, pour raison de retard est sans effet. Pour ce qui est de la responsabilité pour perte ou avarie, l’article 458 stipule, que « toute clause tendant à le décharger de cette responsabilité n’a aucun effet ».
En transport international, les dispositions de la convention CMR relatives à la responsabilité du transporteur, sont des règles d’ordre public(7).
-Y a-t-il possibilité de renoncer à la force majeure ?
Affirmatif. Le contrat peut prévoir qu’une partie sera tenue d’exécuter ses obligations, même en cas de force majeure. D’ailleurs, la rédaction des articles relatifs à la force majeure, dans le code de commerce ou dans le code des obligations et contrats, ne comportent pas de dispositions d’ordre public. Le même constat est enregistré au niveau des dispositions de la convention CMR.
Il est à noter, l’exigence d’une clause expresse pour que le débiteur de l’obligation soit tenu, même en cas de force majeure. Une clause ambigüe ou trop large pourra être jugée non écrite.
-Peut-on convenir pour aménager la force majeure ?
Comme il a été dit pour la possibilité de la renonciation à la force majeure, les parties peuvent l’aménager. Une énumération des cas constitutifs de force majeure, pourra être introduite dans le contrat. En cas de litige, il appartiendra au juge de décider si la liste figurant sur le contrat a un caractère limitatif ou seulement indicatif.
-Faut-il notifier la force majeure à son cocontractant ?

En l’absence de dispositions juridiques donnant réponse à cette question, et en application du principe universel « tout ce qui n’est pas interdit est permis », il est souhaitable que la partie qui ne peut pas accomplir ses obligations et s’estime confrontée à un cas de force majeure, le notifie à son contractant. Un comportement sage, permettra à ce dernier d’anticiper des mesures pour limiter son dommage.


(7)Article 41 CMR : « Sous réserve des dispositions de l’art. 40, est nulle et de nul effet toute stipulation qui, directement ou indirectement, dérogerait aux dispositions de la présente Convention ». (l’article 40 fait référence aux articles 37 et 38 relatifs à la possibilité de paiement de l’indemnité par solidarité, lorsqu’il s’agit de la participation de plusieurs transporteurs à l’exécution du contrat de transport)


 

II- Impact du Covid 19 et activité du commissionnaire de transport : difficulté dans le processus de livraison des marchandises.

Myriam EL KHIATI Avocate au Barreau de Casablanca Droit des Affaires Droit des transports

 

Du fait de l’accroissement du volume des échanges internationaux et de la complexité que peut revêtir l’organisation d’un transport international de marchandises, de plus en plus d’entreprises ont recours aux services des commissionnaires de transport en leur qualité « d’organisateur de transport de marchandises de bout en bout ».
Les entreprises y trouvent en effet un intérêt aussi bien économique que juridique :
(i) Un intérêt économique dans la mesure où elles sont totalement déchargées de tout souci organisationnel du transport des marchandises qu’elles souhaitent expédier, le commissionnaire devenant ainsi « leur interlocuteur unique ». Elles bénéficient en
outre de l’expertise du commissionnaire de transport des spécificités du marché du transport ;
(ii) Un intérêt juridique puisque le commissionnaire de transport sera responsable du déplacement de la marchandise depuis son lieu d’expédition jusqu’à son lieu de livraison.
Dans le contexte actuel de la crise sanitaire du COVID19, les commissionnaires de transport de marchandises, en tant que responsables de la chaine logistique, se trouvent actuellement confronter à une problématique récurrente majeure, celle de la livraison des marchandises qui ne peut avoir lieu dans « les conditions habituelles ».
Deux principales situations ressortent, selon les constats avancés par les professionnels du métier et notamment de l’Association des Freights Forwarders du Maroc (AFFM) à travers son président Monsieur Rachid TAHRI :
(i) Soit le destinataire des marchandises, tel que désigné dans les documents de transport, n’est pas en mesure de prendre livraison de la marchandise en raison de la fermeture temporaire de l’entreprise ;
(ii) Soit certaines entreprises refusent, purement et simplement, de décharger les marchandises et d’en prendre livraison pour éviter toute propagation du Coronavirus sur leur personnel.
Quels types de précautions le commissionnaire de transport devra alors adopter pour ne pas voir sa responsabilité contractuelle engagée dans de telles situations ?
Rappelons qu’en application de l’article 430-3 du code de commerce « Le commissionnaire qui se charge d’un transport de marchandises est garant de l’arrivée des marchandises et effets dans le délai déterminé par les parties (…).
L’article 430-4 Code de Commerce ajoute également que « le commissionnaire qui se charge d’un transport de marchandises est responsable vis-à-vis de son commettant, à partir de la réception de la chose à transporter, des avaries ou de la perte totale ou partielle des marchandises et effets jusqu’à sa remise à son destinataire (…)».
Il ressort des dispositions des articles combinés précités que le commissionnaire de transport sera responsable de l’acheminement des marchandises depuis leur prise en charge jusqu’à leur livraison.
On entend par livraison la remise physique de la marchandise au destinataire ou à son représentant qui l’accepte.
Ainsi à partir de la livraison de la marchandise, il s’opère un transfert de risque et de responsabilité du commissionnaire de transport vers le destinataire des marchandises.
En revanche si le commissionnaire de transport n’a pas été en mesure de livrer la marchandise, celle-ci restera sous la garde du commissionnaire de transport ou de son substitué et le commissionnaire restera alors responsable de la marchandise puisque son obligation de livrer la marchandise n’aura pas encore été réalisée.
Aussi, si le commissionnaire est dans l’impossibilité de livrer la marchandise, du fait du destinataire des marchandises, le commissionnaire peut selon les cas adopter les mesures suivantes.
La première mesure, qui est fortement conseillée, sera de prendre attache avec son donneur d’ordre et lui demander toutes instructions écrites utiles si le destinataire des marchandises refuse de prendre livraison de la marchandise pour quelque cause que ce soit.
Le commissionnaire de transport est en effet tenu d’informer le donneur d’ordre sur les différentes étapes relatives à l’acheminement des marchandises sous peine d’engager sa responsabilité personnelle.
Compte tenu du contexte particulièrement sensible lié à la crise sanitaire actuelle, il est recommandé d’obtenir des instructions écrite set ce, pour des questions probatoires.
Ainsi en cas d’empêchement à la livraison, du fait du destinataire (absence du destinataire, inaccessibilité du lieu de livraison, refus par le destinataire de prendre livraison), tous les frais supplémentaires engagés pour le compte de la marchandise devraient rester en principe à la charge du donneur d’ordre, sauf en cas de faute du commissionnaire de transport ou de son substitué.
Etant donné que la question des frais liés aux défauts de livraison n’est pas clairement définie par les textes il est conseillé aux commissionnaires de transport de s’assurer, avant l’exécution de la prestation, que leur donneur d’ordre accepte expressément de prendre en charge tous les frais liés à « tout empêchement à la livraison » ou en « cas de refus ou défaillance du destinataire de prendre livraison des marchandises ».
Cet accord peut se formaliser par l’acceptation du donneur d’ordre via sa signature des conditions générales de ventes du commissionnaire de transport prévoyant dans ses dispositions un article spécifique relatif aux « empêchements à la livraison, refus ou défaillance du destinataire » qui rappellerait qu’en cas « d’empêchement à la livraison (absence du destinataire, inaccessibilité du lieu de livraison, refus par le destinataire de prendre livraison, etc.), tous les frais supplémentaires engagés pour le compte de la marchandise resteront à la charge du donneur d’ordre ».
A défaut de l’existence de conditions générales, le commissionnaire de transport pourra, au moment de la réception de l’ordre de transport, solliciter du donneur d’ordre son accord express quant à la prise en charge de ces frais.
Le donneur d’ordre pourra ainsi donner son accord par la signature d’une simple attestation émanant de son représentant légal ou en signant un contrat de commission de transport contenant une clause similaire à celle précitée.
Ainsi si le commissionnaire, dans le cadre de son obligation de sécurité, serait amené à conserver la marchandise en attente des instructions de son donneur d’ordre dans le cas où la marchandise ne serait pas en mesure d’être livrée, tous les frais de stockage seront répercutés sur le cocontractant du commissionnaire de transport au titre du contrat de commission de transport.
Le commissionnaire de transport devra en outre informer son substitué de toutes mesures communiquées par son donneur d’ordre dans le cadre de cette situation, le commissionnaire de transport étant en effet garant de ses substitués en application des dispositions de l’article 430-5 du code de commerce.
Ainsi en cas de refus ou d’absence du destinataire des marchandises ayant pour effet d’empêcher la livraison de la marchandise, si le commissionnaire de transport est en mesure de justifier (i) qu’il a demandé toutes instructions utiles à son donneur d’ordre pour la suite à réserver aux marchandises (ii) qu’il a pris toutes les mesures utiles pour conserver la marchandise en attente des instructions de son donneur d’ordre, il pourra garantir sa responsabilité.
Il pourra en outre invoquer également les causes d’exonérations légales du transporteur prévues par les dispositions de l’article 459 du code de commerce applicables également au commissionnaire de transport en application de l’article 430.4 du code de commerce.
Le commissionnaire de transport pourra ainsi être « déchargé de toute responsabilité » s’il prouve que la perte ou les avaries des marchandises ont été causées (…) « par le fait ou les instructions de l’expéditeur ou du destinataire ».


III- COVID 19 : EFFETS DE L’APPLICATION AU MAROC DU DECRET-LOI 2.20.292 RELATIF A L’ÉTAT D’URGENCE SANITAIRE SUR LA RESPONSABILITÉ DU TRANSPORTEUR DE MARCHANDISES PAR MER

Mohamed Laazizi (Docteur en Droit Maritime et Aérien/Directeur du Cabinet d’Expertise et de consulting INSTRASOL)

 

I-Introduction

Au Maroc, l’état d’urgence sanitaire ainsi que les mesures de prévention et de lutte contre le COVID 19, ont été ordonnés par Décret-loi N°2.20.292 publié au Bulletin Officiel 6867 BIS du 24 MARS 2020.Cet état d’urgence en vigueur jusqu’au 20 AVRIL 2020 a été prorogé au 20 MAI 2020.
Pour éviter la propagation de la pandémie, le Ministère de la justice a ordonné la suspension des audiences des tribunaux à l’exception de celle concernant les personnes poursuivies en état de détention, des dossiers en référé et des dossiers d’instructions. Cette réduction des services de la justice ne permet pas aux destinataires et aux assureurs de la marchandise d’effectuer les formalités judiciaires exigées pour sauvegarder leurs droits contre le transporteur
C’est pourquoi l’article 6 de ce Décret-loi dispose que « tous les délais prévus par les textes législatifs et réglementaires en vigueur, sont suspendus durant la période de l’état d’urgence sanitaire déclarée et jusqu’à l’annonce officielle de sa fin. Les délais précités reprennent à courir à compter du jour suivant la levée de l’état d’urgence sanitaire. »

II/ Quels sont les effets économiques de cet état d’urgence sanitaire sur les transports maritimes au Maroc ?

S’il est encore trop tôt de chiffrer sur le plan économique les conséquences de la pandémie du Covid 19, force est de constater que le ralentissement du commerce chinois a entrainé celui du commerce mondial. Ce ralentissement a eu rapidement un effet sur le prix du pétrole qui est passé de 65$ le baril en janvier à 50$ à fin février, puis à 30 $ au début du mois de Mai 2020. Au Maroc les différents organismes intéressés au transport (ANP, TMSA,MARSA MAROC,APRAM,AMLOG …) s’accordent à dire que toutes les activités maritimes et notamment celles de la croisière et du transport des passagers sont touchées de plein fouet par cette crise sanitaire. Certains navires se trouvent interdits d’accoster ce qui est le cas des paquebots ,d’autres sont parfois obligés d’observer la quarantaine avant d’être autorisés à accoster, ce qui entraîne une prolongation de la durée du voyage avec tous les risques susceptibles d’en découler. La branche la moins affectée est le transport des marchandises qui semble fonctionner normalement, même si l’on constate que les navires se trouvent souvent en position de magasins flottants et que le stockage intermédiaire en transit, entre le déchargement et la livraison, a tendance à se prolonger . De possibles retards et avaries à la cargaison pourront être enregistrés à la livraison, même s’i l’on ne note pas de blocages majeurs aux ports.

III / Quels sont les effets de cet état d’urgence sur l’activité portuaire ?

Selon les chiffres disponibles et notamment le communiqué de presse de l’ANP daté du 8 AVRIL 2020, les ports marocains gérés par cette Agence ont enregistré au cours du 1er trimestre 2020 une hausse de 2,7% en nombre de navires et de 7,3% en volume des échanges.
Les importations de céréales, de charbon et de pétrole ont augmenté en moyenne de 7,4%.
Les exportations d’engrais, phosphates, conteneurs, produits sidérurgiques, bois et dérivés ont augmenté en moyenne de 7, 2%.
Suivant le journal « l’Economiste » du 27 AVRIL 2020, « il n’y a pas d’impact visible sur le trafic au port de Casablanca. Du moins à l’import. Entre le 14 et le 26 AVRIL, une trentaine de navires étaient à quai, pour décharger leur cargaison, ou en attente en rade du port. Ces derniers, représentaient les deux tiers du nombre des arrivées au port de la capitale économique (20 bâtiments). C’est dire l’intensité de l’activité portuaire. Avec à la clé 7 grands céréaliers. Mauvaise campagne céréalière oblige, l’import des blés, orge et maïs est promis à une forte hausse. Surtout, que le gouvernement a décidé le gel des droits d’importation. Mais le trafic porte aussi sur d’autres biens en vrac solide ou liquide. Entre le 27 avril et le 11 mai prochain, il est programmé l’arrivée de 31 navires. »
Ainsi, la crise sanitaire du COVID 19 impacte les secteurs du transport maritime de façon inégale. Si la croisière semble être la plus touchée, le transport des marchandises semble plutôt bien s’en sortir même si les périodes de quarantaine et de confinement risquent d’occasionner un prolongement des délais habituels du transport, des avaries aux marchandises, et un retard plus ou moins important à la livraison des marchandises.

IV/ Comment le retard à la livraison est-il réglementé en Droit Marocain ?

Avant le 1er novembre 1992, date d’entrée en vigueur des règles de Hambourg le retard à la livraison des marchandises transportées par mer n’était pas réglementé au Maroc. Pour combler ce vide juridique, la plupart des tribunaux étaient obligés de recourir au droit commun. (V. Mohamed Laazizi : « Les Règles de Hambourg et la responsabilité du transporteur de marchandises par mer : esquisse d’une évolution », Thèse de Doctorat en Droit, Université de Nantes, 1987, p : 117 et suite)
Actuellement, cette question et d’autres sont débattues en doctrine , en marge du Décret-loi N°2.20.292 précité (V. par ex Maitre A.ELBAKOURI « EFFETS JURIDIQUES DU COVID 19 SUR LES DELAIS DE RECOURS EN MATIERE CIVILE », article en langue Arabe, in Revue de l’Académie Arabe d’Arbitrage MARS 2020).
Ces questions portent notamment sur le point de savoir si ce Décret-loi et ces mesures sanitaires (restrictions de quarantaines ,ordre de confinement ) dispensent le destinataire des délais de réserves et d’action en responsabilité contre le transporteur maritime de marchandises et d’autre part s’ils constituent ou non, une force majeure de nature à libérer le transporteur maritime de toute responsabilité.

V/ Quel est le sort des délais des réserves et d’action en responsabilité contre le transporteur maritime de marchandises ?

En réponse à cette question, le Décret-loi N°2. 20.292 précité relatif à la déclaration de l’état d’urgence sanitaire au Maroc, prévoit notamment le report des délais qui viendraient à expiration au cours de ces périodes, jusqu’au lendemain de la levée de cet état d’urgence sanitaire. Seuls en sont exclus, les délais d’appel de jugements rendus à l’encontre de personnes poursuivies en état de détention, le décompte des délais de mise en garde à vue et des durées de détention préventive. Ces termes incluent de l’avis des auteurs, les délais d’émission des réserves ainsi que les délais d’action en responsabilité contre le transporteur maritime, par voie judiciaire ou arbitrale. Ces délais de réserves et d’action ne sont pas les mêmes en droit interne et en droit international, et ils diffèrent en fonction de la nature des dommages.

VI / En cas de pertes et d’avaries aux marchandises quels sont les délais de protestation prévus par le Droit Marocain ?

Les transports internes sont régis par le Code de Commerce Maritime (DCCM) du 31 Mars 1919 (V. Mustapha El Khayat, Le Maroc et les Règles de Rotterdam in : « logistique du commerce extérieur du Maroc, un levier de compétitivité » Mélanges en l’honneur de Gilles Paché, p : 119 ; Imprimerie Najah Al Jadida(CTP) Casablanca 1° édition 2017).
L’art.221 de ce Code impose au destinataire pour la recevabilité de son action en responsabilité contre le transporteur maritime, la prise de deux mesures en cas de pertes ou d’avaries de marchandises :
a- la notification au transporteur maritime d’une lettre de réserves dans les huit jours suivant la livraison, par courrier recommandé ou par acte extrajudiciaire,
b – suivie d’une action en justice dans les 90 jours.
L’absence de l’une de ces mesures, est sanctionnée par la forclusion du destinataire qui perd tout recours contre le transporteur maritime.

VII / Quels sont les délais impartis aux destinataires en cas de transports internationaux?

Les transports internationaux sont régis au Maroc par les règles de Hambourg du 31 mars 1978 qui disposent (art.19) que :
-lorsqu’il s’agit de dommages apparents, le destinataire doit émettre ses réserves au plus tard le premier jour ouvrable suivant la livraison,
-lorsqu’il s’agit de dommages non apparents le destinataire doit émettre ses réserves dans les 15 jours consécutifs suivant cette livraison. Le délai d’introduire une action judiciaire ou arbitrale en responsabilité contre le transporteur est de deux ans.

VIII / Qu’en est-il du cas du retard à la livraison ?

Le code de commerce maritime Marocain ne s’applique pas au retard à la livraison comme souligné précédemment. Par contre, les Règles de Hambourg (Art.19-5) réglementent le retard et disposent qu’aucune réparation n’est due pour le préjudice résultant du retard, si le destinataire n’adresse pas ses réserves au transporteur dans les 60 jours suivant la livraison (voir : Mohamed Laazizi : « le retard à la livraison et la responsabilité du transporteur de marchandises par mer », Annuaire de Droit Maritime et Aérospatial, Tome XII, Université de Nantes -1993, P : 325).

IX/ Cet état d’urgence sanitaire est-il une force majeure libératoire pour le transporteur?

Toute la question est de savoir si la crise sanitaire ordonnée par le décret précité constitue ou non un cas de force majeure exonérant le transporteur de sa responsabilité.
Sur le plan législatif, l’article 221 du DCCM dispose que le transporteur maritime est « responsable de toute perte ou avarie occasionnée aux marchandises aussi longtemps qu’elles sont sous sa garde à moins qu’il ne prouve la force majeure ». Les tribunaux Marocains interprètent sévèrement cette notion et ne libèrent le transporteur en cas de dommages à la cargaison qu’en présence d’un évènement extérieur, imprévisible et insurmontable. Elle a considéré par exemple qu’une tempête exceptionnelle de Force 12 BF en hiver est parfaitement prévisible et ne saurait constituer un cas de force majeure libérant le transporteur de sa responsabilité.
Les règles de Hambourg (article 5-1) n’exigent pas du transporteur pour se libérer de sa responsabilité, la preuve d’un événement de force majeure, c’est-à-dire d’un évènement extérieur, imprévisible et insurmontable, mais seulement la preuve que celui-ci et ses préposés et mandataires ont exercé une diligence raisonnable pour éviter l’évènement et ses conséquences. (V. Mohamed Laazizi : « les règles de Hambourg vues par le transporteur maritime Marocain », Revue Marocaine de Droit et d’Economie du Développement n 38 ; 1996/1997 ; p : 117).
Ces règles disposent en effet (art.5-1) que « le transporteur est responsable du préjudice résultant des pertes ou des dommages subis par les marchandises ainsi que du retard à la livraison si l’évènement qui a causé la perte le dommage ou le retard a eu lieu pendant que les marchandises étaient sous sa garde au sens de l’article 4 , à moins qu’il ne prouve que lui-même ses préposés ou mandataires ont pris toutes les mesures qui pouvaient raisonnablement être exigées pour éviter l’évènement et ses conséquences. »

X/ Quelle est la position de la Doctrine ?

Certains auteurs au Maroc débattent de cette question (V. Maitre S.Fassi Fihri : « La force majeure à l’épreuve du Coronavirus », Revue BFR 18 MARS 2020) ; (Maitre Khadraoui « Effets juridiques du COVID 19 sur les engagements contractuels » Revue de l’Académie Arabe d’Arbitrage MARS 2020), sur la base du droit commun qui exige d’un évènement, les caractères extérieur, imprévisible et irrésistible pour que celui-ci soit qualifié de cas de force majeure .
Or, il est à noter que cette question est nuancée en droit des transports maritimes, généralement imprégné de la notion de fortune de mer et de partage des risques maritimes entre les intérêts navire et cargaison. La convention de Bruxelles de 1924 par exemple édicte une liste de 17 cas exceptés de la responsabilité du transporteur, outre le cas d’innavigabilité du navire, en leur donnant ainsi l’effet libératoire de responsabilité, sans en exiger ces trois caractères de force majeure. L’art (4-2, g/h) prévoit nommément l’exonération du transporteur maritime de toute responsabilité, si la perte ou le dommage provient d’une contrainte de prince (art 4-2,g), ou d’une restriction de quarantaine (art 4-2,/h).
Les règles de Hambourg n’ont pas repris nommément ces causes d’exonération de la convention de Bruxelles. Contrairement à celle-ci, elles posent un principe général d’exonération (preuve par le transporteur d’avoir pris les mesures raisonnablement exigées pour éviter l’événement et ses conséquences) et édicte des causses particulières de libération du transporteur (le sauvetage, l’incendie, les risques tenant au transport en pontée régulier, et les risques inhérents au transport d’animaux vivants.
Ce principe général d’exonération évoque sans doute l’idée de force majeure, mais sans en exiger les caractères absolus d’un évènement irrésistible insurmontable. Il s’agit à notre avis d’un évènement qui ne peut être ni évité, ni surmonté par l’exercice d’une diligence raisonnable. Les Règles de Hambourg imposent certes au transporteur d’éviter l’événement est ses conséquences en prenant, non pas toutes les mesures nécessaires mais, toutes les mesures raisonnables normalement exigibles d’un bon transporteur ; il s’agit d’une diligence à la mesure des capacités humaines et non pas d’une diligence absolue à laquelle nul n’est tenu.

XI / Quelle est la position de la Jurisprudence ?

Les tribunaux ont un rôle important à jouer en la matière. Qualifier la crise sanitaire de force majeure ou non dépend de l’appréciation des juges du fond .Ils doivent déterminer si la pandémie du COVID 19 et la restriction de quarantaine qui s’en est suivie constituent ou non des cas de force majeure.
Dans deux arrêts n° 706 et 2516 rendus respectivement le 5 avril 1988, et 29 Décembre 1988 (non publiés, cités par Maitre Y. Bennouna in « La responsabilité du transporteur maritime à la lumière du Droit Marocain », Ouvrage en langue arabe, Sochepress 1993, p.86) la cour d’appel de Casablanca a jugé qu’une tempête durant le mois de février est parfaitement prévisible et ne pouvait constituer un cas de force majeure. Elle a jugé en conséquence que le capitaine du navire en question devait prévoir la survenance d’un tel événement et prendre toutes les mesures pour l’éviter ou le surmonter ».
Ainsi, le pouvoir discrétionnaire des juges du fond en la matière est considérable mais la qualification est une question de droit, soumise au contrôle de la Cour de Cassation.
Cette interprétation restrictive et sévère a été rendue sous l’empire du DCCM, plusieurs années avant l’entrée en vigueur des Règles de Hambourg et ne tient pas compte de la notion de fortune de mer et des risques de mer qui caractérisent la navigation maritime. Les Règles de Hambourg allaient atténuer cependant cette sévérité et donner un sens plus large à la notion de force majeure en permettant au transporteur de se libérer de sa responsabilité en prouvant la prise non pas de toutes les mesures nécessaires et absolues, mais simplement de prise des mesures raisonnables exigibles d’un transporteur diligent, pour éviter l’évènement et ses conséquences,
Ainsi, sans imposer au transporteur maritime la preuve d’un événement extérieur, imprévisible et insurmontable, les règles de Hambourg permettent au transporteur maritime de se libérer de sa responsabilité, s’il prouve que lui-même ses préposés et mandataires ont pris simplement toutes les mesures raisonnables pour éviter le dommage et ses conséquences. Ainsi, on ne voit pas logiquement, ce que le transporteur maritime pourrait prendre comme mesures raisonnables pour éviter la survenance de l’épidémie, ainsi que le confinement sanitaire et les restrictions de quarantaine imposées par les autorités, ni le retard à la livraison qui en est résulté.
Or comme signalé précédemment, la convention de Bruxelles prévoit expressément comme causes d’exonération du transporteur maritime la restriction de quarantaine et l’ordre de l’autorité (art. 4-2, g/h).La jurisprudence a constamment exonéré le transporteur maritime pour restriction de quarantaine ou ordre des autorités (V. Y. Bennouna ; ouvrage précité, p.87)
Par conséquent, et même si le Maroc n’est pas partie à la convention de Bruxelles, il est fort probable que les magistrats s’en inspireront pour qualifier ou non de force majeure exonératoire de toute responsabilité du transporteur au sens du DCCM et des règles de Hambourg, ces restrictions de quarantaine imposées par les autorités ainsi que le retard à la livraison qui en a découlé.
En faveur de cette interprétation on peut avancer un précédent jurisprudentiel concernant l’exonération du transporteur maritime pour Freinte de route concernant des manquants relevés à la livraison sur des marchandises en vrac. En effet, et alors que la convention de Bruxelles (art 4-2, m) prévoit expressément cette freinte comme cas excepté de la responsabilité du transporteur, les règles de Hambourg ne contiennent pas de dispositions similaires.
Après des années d’hésitations, les tribunaux marocains, les cours d’appel et la Cour Suprême (devenue aujourd’hui la Cour de Cassation) ont finalement admis le bénéfice de cette exception en faveur du transporteur maritime (V. Mohamed Laazizi : « le transporteur et l’assureur maritimes de marchandises, ont-ils encore le droit de bénéficier de la freinte de route en droit Marocain ? » in Le Droit Maritime dans tous ses états, Presses Universitaires d’Aix Marseille-2016, p : 167).
Par conséquent, et sans être catégorique, on peut dire que ce sera là l’interprétation qui en sera faite probablement par les tribunaux Marocains.

XII / CONCLUSION

En conclusion, le Décret précité a suspendu les délais qui s’imposent aux destinataires et à leurs assureurs subrogés dans leurs droits, soit pour émettre leurs réserves à l’encontre du transporteur maritime en cas de dommages à la cargaison ou de retard à la livraison , soit pour l’exercice de l’action en responsabilité contre ce transporteur. Ces délais, ainsi mis entre parenthèses pendant toute la durée de cette crise sont suspendus et reprendront, le lendemain de la levée de ces mesures sanitaires.
En ce qui concerne la qualification de ces mesures de force majeure exonératoire de toute responsabilité du transporteur maritime, la réponse parait positive même si la question relève en définitive de l’appréciation souveraine des tribunaux. Néanmoins, il faut souligner que même si cette exonération serait acquise au transporteur, les armateurs sont moins préoccupés par le souci d’échapper à leur responsabilité (couverte du reste auprès de leurs P&I Clubs), en cherchant à invoquer des cas de force majeure, que par la préparation de l’après Corona, en recherchant surtout les moyens de développer leur business et donner entière satisfaction à leur clientèle.

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page