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Restitution de l’aide au logement : une brèche ouverte à la spéculation immobilière ?

À compter du 1er janvier 2026, les dispositions de l’article 8 de la loi de finances n° 50-22 pour l’année 2023, promulguée par le dahir n° 1-22-75 du 13 décembre 2022, sont modifiées et complétées comme suit :

Élargissement des bénéficiaires

  • L’aide de l’État au logement est ouverte aux acquéreurs d’un logement à usage d’habitation principale.
  • Les copropriétaires en indivision sont désormais éligibles à cette aide, sous les mêmes conditions que les autres acquéreurs.

Engagements du bénéficiaire

L’acquéreur bénéficiant de l’aide s’engage à :

  • Affecter le logement à son habitation principale pour une durée minimale de cinq (5) ans à compter de la date du contrat de vente définitif ;
  • Ne pas céder le logement avant l’expiration de cette période ;
  • Restituer à l’État le montant de l’aide si le logement est vendu avant cinq ans ou n’est pas occupé à titre de résidence principale pendant cette durée.

Restitution de l’aide

La restitution à l’État du montant de l’aide intervient :

  • soit par le notaire, au moment de la conclusion du contrat définitif en cas d’infraction détectée à ce stade ;
  • soit par le bénéficiaire lui-même, s’il revend le bien ou ne respecte pas la condition d’occupation pendant les cinq années.

Mainlevée de l’hypothèque

La levée de l’hypothèque constituée en garantie du respect des conditions est accordée :

  1. Avant cinq ans : si le bénéficiaire rembourse intégralement à l’État le montant de l’aide ;
  2. Après cinq ans : sur présentation des justificatifs attestant que le logement a bien servi d’habitation principale durant toute la période requise.

Le risque potentiel de spéculation

Le dispositif prévoit que le bénéficiaire peut revendre son logement avant 5 ans, à condition de rembourser à l’État le montant de l’aide. Cela crée une porte de sortie légale, qui pourrait être utilisée par certains acquéreurs pour :

  • acheter un logement subventionné,
  • profiter de la hausse du marché,
  • revendre avec bénéfice après avoir simplement restitué l’aide initiale.

Ainsi, même si le Trésor récupère le montant du soutien, le bénéficiaire pourrait réaliser une plus-value importante, ce qui détournerait l’aide de son objectif social (favoriser l’accès durable à la propriété principale).

Objectif initial du dispositif

Le but de l’aide est de :

  • faciliter l’accès au logement principal pour les ménages à revenus modestes,
  • stabiliser la demande dans le segment social et moyen standing,
  • et réduire les tensions spéculatives dans le marché immobilier.

La possibilité de revente anticipée — même avec restitution — entre en tension avec cet objectif, puisqu’elle réintroduit une logique de court terme et de profit.

Solutions ou garde-fous envisageables

Pour éviter les dérives spéculatives, plusieurs pistes réglementaires sont possibles :

  1. Conditionner la revente à des motifs légitimes (mobilité professionnelle, décès, divorce, etc.).
  2. Imposer une pénalité supplémentaire (ex. restitution majorée ou partielle selon la durée écoulée).
  3. Introduire un droit de préemption de l’État sur les logements subventionnés revendus avant 5 ans.
  4. Renforcer le contrôle notarial et fiscal afin de vérifier la bonne affectation du logement.

Le mécanisme de restitution de l’aide en cas de revente anticipée vise à préserver les fonds publics, mais il n’élimine pas totalement le risque de spéculation. Sans encadrement complémentaire, certains bénéficiaires pourraient détourner le dispositif à des fins lucratives, en contradiction avec l’esprit social de la réforme.

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