
Tout au long de l’été, Virgule et Luxembourg Times présenteront des profils de différents employés luxembourgeois, donnant un aperçu de leur quotidien dans différents secteurs et entreprises.
Anticipation, réaction, solution. C’est le quotidien d’Hicham Ajnaou, 48 ans, et 20 ans d’expérience dans le métier. Il est à la tête de la conciergerie de luxe pour le Sofitel Luxembourg Europe au Kirchberg et parle trois langues: l’anglais, le français et l’arabe. L’établissement affiche 5 étoiles et a une réputation à tenir. Un standing qui mixe la «culture locale du Luxembourg» et «le savoir-faire français dans l’élégance et dans l’accueil».
Hicham est avenant, souriant. Dès qu’il voit un client arriver aux abords de la réception ou sur le parvis de l’hôtel, il accourt. Aux petits soins, il s’enquiert toujours de savoir si le séjour des invités de l’hôtel se passe bien, s’ils ont besoin d’aide pour monter leurs bagages ou s’ils auraient un besoin particulier.
Si l’homme hyperactif est totalement à sa place, rien ne le prédestinait au départ à suivre cette voie… Hicham est marocain d’origine. Après des études à Sciences-Po, il voulait se rendre aux États-Unis mais «le destin» le fait rester au Maroc. Il y exerce alors la profession de policier durant cinq ans. C’est à ce moment précis qu’il va rencontrer celle qui deviendra sa femme, une Luxembourgeoise. Après le mariage, le couple s’installe au Luxembourg où Hicham fera ses débuts dans l’hôtellerie, au Sofitel Le Grand-Ducal, l’autre 5 étoiles du groupe français situé dans la capitale. Il y passera 11 ans avant de rejoindre l’établissement du Kirchberg, à la tête de la conciergerie.
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«Je fais tout»
Pour mieux s’immerger dans le monde du concierge de luxe, Virgule a suivi Hicham dans son marathon de tâches habituelles. «La première chose que je fais lorsque j’arrive sur mon lieu de travail est de saluer mes collègues», explique-t-il avec un large sourire. Ensuite, il vérifie les extérieurs: aux abords du Sofitel, il faut que rien ne traîne. Il continue son inspection sur le parking où il vérifie avec soin qu’aucune voiture n’a été endommagée ou qu’aucune affaire d’un client n’a fini par atterrir malencontreusement sur le macadam.
Puis, vient le moment de passer par la case vérification des mails. Étape indispensable pour prendre connaissance des demandes effectuées à l’intention de la conciergerie. «La conciergerie, c’est vaste. Je peux effectuer toute sorte de tâches. C’est simple, je fais tout», confie-t-il. Lorsqu’il passe en revue tous les mails accumulés dans la boîte, dans les périodes charnières, l’un de ses collègues est en permanence mobilisé à l’extérieur pour accueillir convenablement les clients.
«Nous voulons faire vivre une expérience inoubliable, nous misons tout sur la relation client. Le but, c’est de faire revenir le client. Et pour fidéliser le client, cela passe par un service totalement personnalisé. Nous ne sommes pas des robots», souligne Hicham Ajnaou.
Naviguer entre demandes spécifiques
Sa bonne humeur est contagieuse, sa motivation inspirante. Son métier consiste globalement à résoudre des problèmes et à trouver des solutions… à tout prix. Cela passe par une demande de billets de train, une demande d’information sur le Luxembourg, sur ses sites touristiques. Et parfois, cela va beaucoup plus loin…
«J’ai beaucoup de clients d’Amérique latine ou d’Américains qui m’appellent pour retrouver un ancêtre, un arrière-arrière-arrière-grand-père qui était luxembourgeois. Je deviens détective: j’appelle les communes pour retrouver les noms en question sur les registres… N’importe quelle demande du client qui a un caractère légal, il faut la satisfaire», explique Hicham Ajnaou.
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Il ne compte plus le nombre d’anecdotes liées à ce métier qu’il pratique depuis 20 ans. Il se rappelle ainsi du jour où un client a laissé son passeport dans l’avion au niveau de la poche du siège devant lui… «Il a fallu appeler l’aéroport, la police mondiale de l’aéroport, la douane pour savoir où se trouvait le passeport. En plus, les clients, quand ils arrivent au Luxembourg, ils ne connaissent pas les lois, ils sont perdus; alors ils ont besoin de repères et leur repère, c’est la conciergerie.» Il y a aussi ceux qui veulent visiter le Luxembourg en une heure et Hicham doit trouver une parade pour réserver un hélicoptère qui peut recueillir les autorisations à temps.

Respect, attention: la Bible pour avoir des clients fidèles
Ses clients se composent majoritairement de voyageurs business. Les touristes viennent surtout le week-end ou durant la période estivale. «Nous avons beaucoup de clients fidèles, avec qui nous avons dépassé le stade de la simple relation client. Ils se sentent chez eux. Ils ont leurs habitudes, nous savons ce qu’ils veulent», remarque Hicham.
Et c’est vrai: lorsque nous accompagnons Hicham derrière la réception pour consulter ses mails, il est constamment aux aguets. Il ne faut pas faire attendre les clients, et se dirige automatiquement vers eux pour les aider. Mieux, il anticipe même les demandes de ses clients comme ce ticket de parking, source de surprise et de rire pour l’un d’eux. «Il y a une intimité respectueuse qui se développe.»
Tout est fait pour que le client se sente comme un roi. Cela passe par des petites attentions disséminées ci et là. Le personnel peut inclure des petits cadeaux personnalisés qui sont installés dans les chambres avant l’arrivée des visiteurs: gâteaux avec la forme de cœur pour la Saint-Valentin, champagne, noix, amandes, chocolats, petites attentions pour les enfants, crémants luxembourgeois… Tout est imaginable et sélectionné avec, de préférence, des produits locaux.
Justement, nous accompagnons Hicham dans la confection d’un chariot spécial pour un «client fidèle» qui devrait arriver l’après-midi. Le concierge de luxe récupère le matériel en cuisine et va chercher tous les ustensiles dont il a besoin. Il jongle entre la cuisine et le bar.
Il connait «tous les recoins»: il installe des chocolats rochers, du crémant luxembourgeois dans un seau à glace, des amandes et des noix dans des récipients. Direction le troisième étage. M. Ajnaou s’engage dans la chambre de l’habitué. Le chariot est dans la suite quand… surprise, le client est déjà arrivé dans sa chambre et il ne comprend pas vraiment ce que nous faisons là. Le concierge lui indique son intention. Un sourire passe sur le visage du client… C’est bon pour cette fois.
Les horaires du concierge sont variables de 14h/15h jusqu’à 22/23h. «Mais parfois, je peux aussi débuter ma journée à 7h ou travailler les week-ends», explique le concierge du Sofitel. Ces conditions peuvent mettre à mal l’équilibre vie professionnelle/vie personnelle, mais Hicham garde le sourire. «Le domaine de la conciergerie, ça change énormément. Chaque jour est un nouveau défi. Ça booste notre intellect, nos capacités; nous ne sommes pas dans une routine.» La politique de l’hôtel reste de respecter la vie personnelle et les urgences surviennent donc peu sur les horaires personnels.
Rencontrer une star à la descente d’ascenseur
Pour rester dans le coup toute la journée, le concierge de luxe et adepte d’arts martiaux ne prend jamais le temps de se poser pour déjeuner. Il est tout le temps en mouvement et gagne du temps sur sa pause, préférant consommer un shaker de protéines, graines de chia incluses: «Je n’ai plus le crash d’énergie après manger.»
Le métier d’Hicham peut aussi se révéler stressant: «Lorsque le client arrive en fin de journée, il a accumulé toute la fatigue, et tout son stress peut être lâché sur vous. Même si vous n’avez rien fait, il ne faut jamais le prendre pour soi. Il faut avoir de l’ouverture d’esprit et savoir se mettre à la place des autres», pointe le professionnel.
Un stress que le concierge de luxe sait transformer en motivation et en performance. Un stress «bien moins grave» que ses anciennes situations professionnelles auxquelles il pouvait se retrouver confronté comme policier.
D’autant que souvent, il faut s’occuper de clients de marque: les VIP. Ceux-ci peuvent arriver au niveau de l’ancienne entrée du Sofitel, située à l’arrière du bâtiment qui procure une confidentialité optimale, au même titre que le cinquième étage consacré aux personnalités en quête de discrétion. Il est utilisé pour des célébrités, «des ministres», «des rois» et même des artistes… Avant notre départ, au moment d’appeler l’ascenseur, nous avons croisé la star d’un groupe de rock mondialement connu, qui s’est récemment produit au Luxembourg pour un concert. On vous laisse deviner qui…
Virgule