Croissance Verte

La France vient d’introduire l’affichage environnemental textile

Responsable de 4 à 8% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, l’industrie textile a une incidence dévastatrice sur l’environnement. La fast fashion est encore pire, avec sa consommation importante de ressources et son faible taux de recyclage. La France affiche désormais cet impact sur les habits.

Pour sensibiliser l’industrie textile et sa clientèle aux problèmes environnementaux créés par la production de vêtements, la France vient d’introduire l’affichage environnemental textile.

Une mesure ressemblant au Nutriscore, qui indique la valeur nutritive des aliments, ou l’étiquette énergie, qui renseigne sur la consommation des appareils électriques: « Cet affichage a pour but de mieux expliquer et exprimer aux consommateurs quels sont les impacts, dans les filières textiles, sur l’intégralité du cycle de vie, entre ressource, production, utilisation et fin de vie », explique Laurent Maeder, expert en textile et en économie circulaire.

Pour calculer l’impact des vêtements, de nombreux critères ont été retenus. Car, en plus des gaz à effet de serre, l’industrie textile entraîne aussi une pollution massive des eaux par les teintures et les microplastiques. Sans oublier la production de montagnes de déchets.

La consommation d’eau – la fabrication d’un jeans nécessite environ 11’000 litres d’eau – et de pesticides est également excessive.

Evaluer plusieurs critères

Il a fallu choisir des critères: « On a trois catégories: la santé humaine, où on va regarder tous les intrants, tous les polluants possibles qu’on rentre dans la chaîne », détaille Laurent Maeder: « Après, on a la pression sur les ressources et en trois, les impacts sur les écosystèmes. Pour faire simple, ce sont les impacts qui peuvent dégrader la qualité de l’eau, de l’air et des sols ».

Greenpeace Suisse salue cette innovation: « Nous considérons cet outil comme très intéressant pour permettre d’une part aux consommateurs de choisir des habits de qualité », note Joëlle Hérin, experte en systèmes de consommation auprès de l’organisation environnementaliste. « Mais surtout d’autre part pour inciter le secteur de la mode à produire moins de quantité et plus de qualité ».

Les entreprises fabricantes vont évaluer l’impact de leurs produits en s’appuyant sur l’instrument qui a été mis en place: « La méthodologie existe et a été publiée; elle doit passer par une partie tierce, un organe indépendant qui doit valider la récolte des données et transformer ça en écoscore », détaille Laurent Maeder.

Pour l’instant, la démarche est facultative; elle pourrait devenir obligatoire dans une année. Mais les entreprises jouent déjà le jeu: « Les grands acteurs du textile font déjà partie du processus », souligne l’expert en économie circulaire. « Elles vont, pour la plupart, utiliser et calculer leurs impacts. Moi, je suis toujours un peu plus inquiet pour les PME, qui « doivent bénéficier d’aides « pour obtenir les informations auprès de leurs chaînes de valeur ».

Un affichage textile difficile à décrypter

Alors que le Nutriscore est très facile à lire, avec ses cinq lettres et ses cinq couleurs, l’affichage textile l’est nettement moins. L’étiquette est en noir et blanc, avec une nombre de points d’impact négatifs. Ce n’est pas optimal: « Ce chiffre, s’il est élevé, indique un impact environnemental négatif relativement élevé. Ce sont des unités qui sont nouvelles pour les consommateurs: elles sont difficiles à interpréter », estime Joëlle Hérin, de Greenpeace. « Les autorités française vont devoir communiquer pour donner des clefs d’interprétation ».

En Suisse, la loi révisée sur la protection de l’environnement permet de renforcer l’économie circulaire. Mais pour l’instant, il n’existe pas d’affichage pour les textiles. Le système français pourrait toutefois bien s’imposer naturellement.

« Comme le textile est mondialisé, les marques européennes ne vont pas enlever l’écoscore pour arriver sur le marché suisse », remarque Laurent Maeder. « Les marques suisses qui veulent vendre en Europe devront aussi passer par là. Donc il y a tout intérêt que la Suisse s’empare aussi de ce genre de méthodologie ».

Mais il faudra probablement patienter: « Il est quand même plus que probable que le Conseil fédéral attende la mise en place de l’étiquetage textile au niveau européen au lieu de rejoindre le peloton de tête et le système français », pronostique Joëlle Hérin.

En guise de conclusion, il n’est peut-être pas inutile de rappeler un conseil plein de bon sens, distillé par Laurent Maeder: « Attention, ce n’est pas parce qu’un produit est A ou B que c’est une carte blanche pour en acheter trois fois plus. Il faut toujours faire attention aux effets rebonds: un produit qui aura une note A n’est pas exempt d’impacts. Il y en a juste moins qu’un produit qui est C ou D », souligne-t-il.

RTSinfo

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