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 Comptes en devises pour résidents non commerçants avec revenus étrangers: Mode d’emploi 

Par Omar Bakkou, économiste spécialisé en politique de changes,

Les dispositions de la règlementation des changes régissant les comptes en devises englobent seize catégories de comptes.

La première catégorie consiste dans les comptes en devises ouverts par les banques auprès de leurs correspondants à l’étranger.

S’agissant de la deuxième catégorie, elle consiste dans les comptes en devises ouverts par les exportateurs auprès des banques marocaines.

Quant à la troisième catégorie de comptes en devises, elle consiste dans les comptes en devises ouverts auprès des banques marocaines par les exportateurs de services soumissionnaires ou titulaires de marchés à l’étranger.

Dans le présent entretien, nous allons interroger O.Bakkou au sujet de la quatrième catégorie de  comptes en devises . Il s’agit de comptes en devises ouverts auprès des banques marocaines par les personnes physiques résidentes non inscrites au registre du commerce et disposant de revenus de source étrangère.

Quelles sont les modalités de fonctionnement des comptes en devises ouverts au nom des personnes physiques résidentes non inscrites au registre du commerce et disposant de revenus de source étrangère  ?

Préalablement à la définition des modalités de fonctionnement des comptes  en devises des personnes physiques non inscrites au registre de commerce, il convient au préalable de préciser la finalité présumée de ces comptes.

Cette finalité réside exclusivement dans la prémunition des détenteurs desdits comptes contre les risques de dépréciation du taux de change du dirham.

Le mot « exclusivement » est choisi délibérément pour différencier les comptes précités de ceux des exportateurs qui prévoient des avantages particuliers en faveur de ces derniers.

Tandis que les comptes en devises des personnes physiques non inscrites au registre du commerce ne prévoient aucun avantage particulier en faveur de leurs détenteurs : le seul avantage est qu’au lieu qu’ils cèdent leurs recettes en devises, ils sont autorisés à détenir ces recettes dans des comptes en devises afin d’utiliser lesdites recettes pour effectuer leurs dépenses en devises prévisibles conformément aux dispositions de la règlementation des changes.

Ces éléments suggèrent ainsi que le seul objectif présumé derrière l’institution des comptes en devises des personnes physiques non inscrites au registre de commerce réside dans la prémunition de leurs détenteurs contre les risques présumés de dépréciation du taux de change du dirham.

Prémunition des détenteurs desdits comptes contre les risques de dépréciation du taux de change du dirham. Pourriez-vous nous expliquer cela davantage ?

Cette question a été largement traitée lors des deux précédents entretiens.

C’est clair, venons maintenant aux modalités de fonctionnement des comptes en devises ouverts au nom des personnes physiques résidentes non inscrites au registre du commerce et disposant de revenus de source étrangère ?

Les modalités de fonctionnement de ces comptes en devises   consistent en un certain nombre d’opérations pouvant être enregistrées au crédit et au débit desdits   comptes.

 Quelles sont les opérations pouvant être enregistrées au crédit de ces comptes ?

Les opérations pouvant être enregistrées au crédit des comptes précités sont les suivantes : 

-70% au maximum des revenus de source étrangère rapatriés. Le reliquat doit être cédé sur le marché des changes ;

-Les revenus et produits de cession des actifs financiers détenus au Maroc sur des marchés règlementés (OPCVM, actions en bourse, dépôts à terme, etc.) ;

-Le produit de cession de tout investissement réalisé au Maroc par débit de ces comptes , et ce , à hauteur du montant initialement débité.

Et quelles sont les opérations pouvant être enregistrées au débit de ces comptes ?

Les opérations pouvant être enregistrées au débit desdits comptes en devises sont les suivantes : 

-Tout règlement à destination de l’étranger dans le cadre d’opérations courantes ;

-Tout règlement en dirhams au Maroc.

Quels sont vos remarques concernant les modalités de fonctionnement des comptes en devises ouverts au nom des personnes physiques résidentes non inscrites au registre du commerce et disposant de revenus de source étrangère ?

Les comptes en devises ouverts au nom des personnes physiques résidentes non inscrites au registre du commerce et disposant de revenus de source étrangère soulèvent de multiples remarques.

Ces remarques concernent les opérations pouvant être enregistrées au crédit de ces comptes et celles pouvant être enregistrées au débit desdits comptes.

Quelles sont vos remarques concernant les opérations pouvant être enregistrées au crédit ?

Effectivement, les opérations pouvant être enregistrées au crédit des comptes en devises, ouverts au nom des personnes physiques résidentes non inscrites au registre du commerce et disposant de revenus de source étrangère,  soulèvent plusieurs remarques.

La première remarque concerne la quotité maximum de 70% des revenus de source étrangère rapatriés.Cette quotité doit à mon avis être augmentée à 100%.

Est-ce que cette décision ne risque-t-elle pas d’avoir des impacts sur les réserves de change ?

Les comptes en devises précités sont par construction neutre sur le plan « devises » .

Cela signifie que ces comptes n’ont aucun impact sur les réserves de change du Maroc.

Qu’est- ce que vous entendez par le vocable « par construction » ?

Le vocable « par construction » symbolise l’idée que les comptes en devises précités n’accordent aucun avantage majeur à leurs détenteurs en matière de régime de convertibilité du dirham.

En effet, les opérations pouvant enregistrées au débit de ces comptes sont généralement les opérations librement réalisables en vertu de la règlementation des changes.

Par conséquent l’alimentation des comptes en devises par leurs détenteurs n’engendre aucune augmentation des dépenses potentielles du Maroc.

Cela a pour implication que ces comptes n’ont aucun impact sur les réserves de change du Maroc.

Mais les devises logées dans des comptes en devises   ouverts au nom des personnes physiques résidentes non inscrites au registre du commerce  sont des devises en moins sur le marché des changes, n’est-ce pas ?

 Les devises logées dans les comptes précités sont des devises confiées par des entités résidentes (les exportateurs marocains) à des entités résidentes (les banques marocaines).

Par conséquent ces devises restent dans le marché des changes marocain.

Vous dites ci-dessus que les opérations pouvant être enregistrées au crédit des comptes en devises ouverts au nom des personnes physiques résidentes non inscrites au registre du commerce soulèvent plusieurs remarques. Vous en avez cité une, avez-vous d’autres remarques ?

Effectivement, j’ai des remarques concernant les deux autres opérations pouvant être enregistrées au crédit des comptes en devises ouverts au nom des personnes physiques résidentes non inscrites au registre du commerce, à savoir

-Les revenus et produits de cession des actifs financiers détenus au Maroc sur des marchés règlementés (OPCVM, actions en bourse, dépôts à terme, etc.) ;

-Le produit de cession de tout investissement réalisé au Maroc par débit de ces comptes , et ce , à hauteur du montant initialement débité.

Ces deux opérations n’ont aucune raison d’être.

Pourquoi ?

Car en principe, le fait de prévoir une disposition qui permet de créditer les comptes en devises par les deux opérations précitées est opérée dans l’objectif de faire bénéficier les détenteurs de ces comptes de la possibilité de transfert à l’étranger du produit de ces deux opérations.

Or ceci n’est pas le cas puisque les détenteurs de ces comptes ne peuvent les débiter que pour la réalisation d’opérations prévues par le droit commun.

 Quelles sont vos remarques concernant les opérations pouvant être enregistrées au débit ?

Les opérations pouvant être enregistrées au débit soulève une remarque plutôt de forme concernant la première opération : « tout règlement à destination de l’étranger dans le cadre d’opérations courantes ».

Cette opération ,telle qu’elle est formulée ci-dessus,  n’est pas claire dans la mesure où les opérations courantes pouvant être effectuées par les personnes physiques sont soumises à des conditions(plafonds) , notamment celles relatives aux voyages à l’étranger.

Par conséquent , la question demeure posée : est- ce que ces conditions s’appliquent aux opérations de voyages à l’étranger des personnes physiques qui détiennent ces comptes.

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