
Omar Bakkou, économiste spécialisé en politique de changes
Lors du précédent entretien, nous avons interrogé Omar Bakkou au sujet des modalités de fonctionnement des comptes en devises des exportateurs de biens et de services.
En réponse, l’économiste a indiqué que ces modalités consistent en un certain nombre d’opérations pouvant être enregistrées au crédit et au débit de ces comptes.
Les opérations pouvant être enregistrées au crédit des comptes précités ont été largement traitées lors du précédent entretien.
Quant aux opérations pouvant être enregistrées au débit des comptes précités, elles feront l’objet du présent entretien.
Quelles sont les opérations pouvant être enregistrées au débit des comptes en devises des exportateurs de biens et services ?
Les opérations pouvant être enregistrées au débit des comptes en devises des exportateurs de biens et services sont les suivantes :
1-Les opérations, courantes ou en capital, effectuées conformément aux dispositions de l’Instruction Générale des Opérations de Change-24(l’IGOC-24) ;
2-Les opérations définies ci-dessous payées directement à l’étranger, par chèque tiré sur le compte, par carte de paiement internationale adossée audit compte ou par utilisation de billets de banque étrangers obtenus par débit dudit compte :
– Frais afférents à la réalisation d’opérations d’investissement à l’étranger des personnes morales telles que définies par l’article 169 de la présente Instruction (honoraires, impôts, droits, taxes et redevances) ;
– Dépenses au titre des voyages d’affaires telles que définies par l’article 105 de l’IGOC-24 ;
-Frais d’abonnement à des revues scientifiques et techniques, de cotisations et droits d’adhésion à des associations professionnelles ;
-Frais de publicité engagés à l’étranger : insertion dans les journaux, revues, périodiques, affichage ;
– Frais de transit, frais de transport, frais d’analyse ou d’échantillonnage ;
-Frais payables au titre des soumissions à des marchés à réaliser à l’étranger ;
-Frais liés à l’exploitation par les transporteurs marocains de leurs véhicules à l’étranger tels les dépenses de carburant et lubrifiants, les frais de péage d’autoroutes ainsi que tous autres frais liés au véhicule ;
-Frais de participation à des manifestations internationales ;
– Frais liés aux services en rapport avec à son activité, prévus à l’annexe 1 de la présente Instruction ;
3- Les sommes destinées à alimenter un autre compte en devises ou en dirhams convertibles ouvert au nom du même exportateur ;
4- Les frais de voyages organisés par les agences de voyage au profit de résidents. Les frais de prestations terrestres à l’étranger ainsi que les frais de transport payables en devises conformément aux dispositions de l’IGOC-24, peuvent être prélevés sur les disponibilités du compte sur présentation des pièces justificatives prévues par la présente Instruction ;
5- Les sommes destinées à régler des dépenses au Maroc.
Pourriez-vous nous éclairer davantage au sujet des opérations citées ci-dessus ?
Pour mieux appréhender les opérations pouvant être enregistrées au débit des comptes en devises des exportateurs, il serait nécessaire de faire un rappel de l’objectif originel derrière l’institution de ces comptes.
Cet objectif réside essentiellement dans la prémunition des exportateurs contre les risques de dépréciation des cours de change.
Ces risques surgissent en effet pour les exportateurs ayant des dépenses prévisibles en devises au titre de diverses transactions économiques extérieures.
Ainsi , pour pallier lesdits risques, c’est-à-dire éviter de payer des sommes en dirhams supérieures à celles que les exportateurs auraient à payer au cas où lesdits paiements étaient effectués au moment présent, ces exportateurs ont le choix entre deux alternatives.
La première alternative consiste à acheter une couverture auprès des banques : achat à terme de devises, etc.
Quant à la seconde alternative, elle consiste à s’auto-couvrir, et ce, à travers le maintien à titre total ou partielle des devises encaissées au titre leurs opérations d’exportation dans des comptes en devises.
Cette seconde alternative est censée être plus favorable que la première alternative en termes de coûts de couverture, particulièrement lorsque les dates d’encaissements et de décaissements des devises sont plus ou moins proches.
A cet effet, la règlementation des changes a édicté une disposition permettant aux exportateurs de garder les devises encaissées dans des comptes en devises (porter ces recettes au crédit de ces comptes) dans l’objectif d’utiliser ces devises pour la réalisation de leurs dépenses prévisibles en devises.
Cette utilisation s’opère à travers le débit de ces comptes pour la réalisation des opérations courantes ou en capital (première opération indiquée ci-dessus), effectuées conformément aux conditions prévues par cette instruction, explicitées lors de nos précédents entretiens.
Ces conditions concernent notamment les modalités de paiement et les formalités pré-règlements.
En matière de modalités de paiement, elles consistent dans l’obligation de paiement de toutes les opérations libres par virement bancaire, à l’exception des opérations relatives aux voyages professionnels. Ces dernières peuvent en effet être payées en sus des virements bancaires, en billets de banque et par chargement sur une carte de paiement internationale.
S’agissant des formalités pré-règlements, ces dernières ont trait à l’obligation de
présentation aux banques des documents justificatifs bien définis par l’IGOC-24 préalablement à l’exécution par ces dernières des paiements en devises au titre des opérations libres précitées.
Bien entendu, lorsque les exportateurs n’ont plus besoin des devises logées dans leurs comptes pour effectuer des dépenses en devises, ils peuvent céder ces devises sur le marché des changes (cinquième opération indiquée ci-dessus : les sommes destinées à régler des dépenses au Maroc) .
De même, lorsque les exportateurs précités souhaitent transférer les devises qu’ils détiennent dans leurs comptes en devises vers un autre compte en devises, ils peuvent bien évidemment le faire librement (troisième opération indiquée ci-dessus : les sommes destinées à alimenter un autre compte en devises ouvert au nom du même exportateur).
Ceci étant dit, il convient de signaler que l’institution des comptes en devises des exportateurs vise – en sus de leur objectif initial indiqué ci-dessus ( la prémunition de ces exportateurs contre les risques de change) l’octroi à ces derniers de deux avantages particuliers.
Le premier avantage consiste dans la possibilité offerte aux exportateurs détenteurs de comptes en devises de payer certaines opérations courantes et en capital , librement réalisables en vertu de la règlementation des changes, par des modalités autres que le virement bancaire : chèque tiré sur le compte, carte de paiement internationale adossée audit compte ou utilisation de billets de banque étrangers obtenus par débit dudit compte.
Ces opérations englobent : les frais afférents à la réalisation d’opérations d’investissement à l’étranger des personnes morales telles que définies par l’article 169 de l’IGOC-24 (honoraires, impôts, droits, taxes et redevances) et les frais liés aux services prévus à l’annexe 1 de l’IGOC-24(deuxième opération indiquée ci-dessus) .
Quant au second avantage, il consiste dans la possibilité offerte aux exportateurs détenteurs de comptes en devises d’effectuer des paiements au titre de certaines opérations courantes non libres dans le cadre du droit commun, notamment :
-Les frais d’abonnement à des revues scientifiques et techniques, de cotisations et droits d’adhésion à des associations professionnelles (deuxième opération indiquée ci-dessus : deuxième tiret);
– Les frais de transit, frais de transport, frais d’analyse ou d’échantillonnage, etc. deuxième opération indiquée ci-dessus, quatrième tiret).