Croissance Verte

ENTRETIEN-RACHID BENALI, PRÉSIDENT DE LA COMADER

  • Entretien paru dans le dernier numéro

Quel rôle joue la Comader dans la promotion de la Responsabilité Sociale des Entreprises ?

La COMADER représente les intérêts du secteur agricole auprès des pouvoirs publics et des
institutions et a pour mandat de promouvoir le développement durable du secteur agricole
marocain. En fait, la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) constitue un engagement volontaire
des entreprises à intégrer des préoccupations sociales et environnementales dans leurs activités et
leurs interactions avec les parties prenantes (Norme ISO 26000 comme cadre de référence). Les
initiatives et actions de la COMADER, en faveur de la RSE, se caractérisent, essentiellement, par la
sensibilisation et la  formation des membres de la COMADER aux enjeux de la RSE, la promotion de
l’adoption de pratiques agricoles durables par l’encouragement à l’utilisation de techniques agricoles
respectueuses de l’environnement (agriculture biologique, agro-écologie, etc.), le soutien aux

initiatives de réduction des déchets et de valorisation des sous-produits agricoles et la promotion de
l’utilisation rationnelle de l’eau et de l’énergie.
Comme on signale aussi la contribution à l’amélioration des conditions de travail dans le secteur
agricole, moyennant la promotion du respect des droits des travailleurs agricoles, le soutien aux
initiatives de leur formation professionnelle et l’encouragement à la lutte contre le travail des
enfants et le travail forcé.
En termes de défis et de perspectives de la promotion de la RSE dans le secteur agricole marocain, il
est sollicité davantage la sensibilisation et l’engagement des entreprises agricoles, l’accès au
financement pour les projets RSE, engager des mesures et évaluations de l’impact des actions RSE,
sans omettre un cadre réglementaire et incitatif.
La COMADER reste un acteur clé de la promotion de la RSE dans le secteur agricole. Toutefois, la
nécessité de renforcer des partenariats entre la COMADER, les pouvoirs publics, les organisations de
la société civile et les entreprises agricoles, est inéluctable, pour accélérer la transition vers un
secteur agricole plus durable et responsable.

‘’Autrefois perçue comme une ressource abondante, l’eau est désormais au cœur d’un stress hydrique
structurel, menaçant la sécurité alimentaire, le développement économique et la stabilité sociale’’

Quel rôle joue la Comader dans la réduction des émissions de CO₂ ?


La réduction des émissions de CO₂ revêt une importance cruciale pour l’environnement et pour la
lutte contre le changement climatique au Maroc, pour plusieurs raisons stratégiques, écologiques et
socio-économiques; de ce fait, la COMADER accorde une attention particulière à ce sujet et œuvre
en collaboration avec ses partenaires pour atteindre les objectifs attendus à savoir la protection de
l’environnement.
Et le Maroc est particulièrement vulnérable aux effets du changement climatique, notamment à
cause de la rareté de l’eau, la désertification (les zones arides et semi-arides s’étendent, menaçant
l’agriculture et la biodiversité) et les risques naturels accrus, matérialisés par les inondations, les
sécheresses prolongées, et les vagues de chaleur qui deviennent plus fréquentes.
Toutefois, les leviers d’action de la COMADER, pour la réduction des émissions de CO₂ se rapportent,
en premier lieu, à l’incitation à l’adoption de technologies propres par le biais de normes et de
certifications, l’attribution de subventions et d’aides financières aux entreprises et exploitations pour
la mise en œuvre de projets réduisant les émissions de CO₂ (par exemple, énergies renouvelables,
rénovation énergétique, …), la mise en place de campagnes de sensibilisation sur les enjeux du
changement climatique et les bonnes pratiques pour réduire son empreinte carbone.


Quid de la préservation des sols et de la réduction des pesticides et engrais chimiques ?


La COMADER joue un rôle central dans le développement durable du secteur agricole au Maroc. Elle
intervient, entre autres, dans la préservation des sols et la réduction de l’usage des pesticides et
engrais chimiques, en collaboration avec les pouvoirs publics, les Interprofessions agricoles et
d’autres partenaires. Les principaux aspects de son implication sont comme-suit:

  1. Sensibilisation et accompagnement des agriculteurs pour promouvoir les pratiques agricoles
    durables, notamment la fertilisation raisonnée, l’usage de produits phytosanitaires homologués, ou encore les bonnes pratiques agricoles et avec, toutefois, l’encouragement de l’agriculture biologique et intégrée, comme alternatives aux intrants chimiques, en incitant au recours aux fertilisants organiques, à la rotation des cultures et aux techniques agro-écologiques.
  2. Appui à la recherche et à l’innovation, en collaboration avec les institutions de recherche et
    d’enseignement supérieur pour développer et vulgariser des techniques respectueuses des sols,
    telles que l’agriculture de conservation (cas du semis direct, empreinte carbone), l’utilisation de
    biopesticides ou le compostage des déchets agricoles pour produire des amendements organiques
    locaux
  3. La COMADER participe activement aux concertations nationales autour des stratégies agricoles
    (comme Génération Green 2020-2030), en insistant sur l’importance de limiter la dégradation des
    sols et de réduire la dépendance aux intrants chimiques avec une utilisation rationnelle. La
    COMADER milite aussi pour des subventions ciblées sur les pratiques vertueuses (ex : irrigation
    économe, utilisation de l’énergie solaire, fertilisation bio, …) plutôt que sur les produits chimiques
    traditionnels.
  4. Promotion de filières durables, en effet, dans certaines filières, la COMADER appuie des
    démarches de labellisation (Bio, IGP, etc.) qui imposent un cahier des charges limitant l’usage des
    engrais et pesticides chimiques.
  5. Partenariat avec les acteurs internationaux où la COMADER travaille avec des organismes (FAO,
    Banque mondiale, etc.) sur des projets pilotes visant à renforcer la résilience des sols, à améliorer la
    qualité des eaux et à réduire l’impact environnemental de l’agriculture intensive. La COMADER réaffirme son rôle clé dans la transition vers une agriculture respectueuse des sols et
    de environnement.

‘’La mise en œuvre de solutions IA nécessite une infrastructure de télécommunications fiable, incluant
une connectivité internet adéquate’’

Pouvez-vous nous donner des exemples de l ‘intégration de l’intelligence artificielle dans
l’agriculture ?


  1. Dans le cadre de la stratégie Génération Green 2020-2030, le Maroc s’est engagé dans une démarche de modernisation de son secteur agricole, en mettant l’accent sur l’innovation technologique et la durabilité. L’intelligence artificielle (IA) s’inscrit dans cette dynamique, en tant qu’outil de transformation des pratiques agricoles, visant à accroître la productivité, préserver les ressources naturelles et améliorer la résilience du secteur face aux aléas climatiques. En outre les facteurs tels que le changement climatique, la croissance démographique et les problèmes de sécurité alimentaire ont poussé à la recherche des approches plus innovantes comme solution pour protéger et améliorer le secteur agricole. En conséquence, l’IA émerge régulièrement dans le cadre de l’évolution technologique; en agriculture, les principaux domaines d’intégration de l’IA sont comme suit.
    Agriculture de précision : L’IA est utilisée en appui à la télédétection (images satellites, drones) pour
    analyser la santé des cultures, détecter les maladies précoces et estimer les besoins en irrigation et
    fertilisation. Cette approche permet une gestion ciblée et efficiente des intrants agricoles.
    Automatisation et robotique agricole : Des exploitations adoptent des machines intelligentes
    intégrant des systèmes d’IA pour le guidage automatique des tracteurs et l’optimisation des
    opérations de semis et de traitement.

Prévision et gestion des risques climatiques : L’IA est mobilisée dans le développement de modèles
prédictifs pour anticiper les épisodes climatiques extrêmes (sécheresse, gel, chaleur) et améliorer la
planification agricole.
Diagnostic phytosanitaire assisté : Des applications mobiles intégrant l’IA permettent l’identification
des maladies et ravageurs par reconnaissance d’images et la recommandation de traitements
adaptés.
Gestion intelligente de l’irrigation : Dans certaines zones irriguées (Tadla, Gharb, Souss-Massa), des
systèmes IA-sensoriels régulent automatiquement l’irrigation selon l’humidité du sol, les conditions
climatiques et le stade de développement des cultures.
Assurance agricole intelligente : Des projets de micro-assurance utilisent l’IA pour estimer les pertes
agricoles à partir de données satellitaires et météorologiques et déclencher automatiquement les
indemnisations.
Soutien à la recherche agronomique : L’INRA et d’autres institutions scientifiques exploitent l’IA
pour le traitement de données expérimentales, la modélisation des rendements et l’amélioration des
variétés agricoles.

Dans cette optique, la COMADER considère que l’intégration progressive de l’intelligence artificielle
dans l’agriculture marocaine constitue un levier stratégique pour renforcer la compétitivité du
secteur, tout en assurant une gestion durable des ressources. L’extension de ces technologies
requiert cependant un accompagnement adapté en matière de formation, d’infrastructure
numérique et de soutien à l’innovation locale.

L’adoption de l’intelligence artificielle (IA) dans le secteur agricole au Maroc représente à la fois un
défi majeur et une réelle opportunité. Parmi les principaux obstacles figurent le coût élevé des
technologies d’IA, qui limite leur accessibilité pour les petits exploitants, ainsi qu’un déficit notable
en compétences et en formation spécialisées dans ce domaine. De plus, la mise en œuvre de
solutions intelligentes nécessite une infrastructure de télécommunications fiable, incluant une
connectivité internet adéquate, encore insuffisante dans certaines zones.
Malgré ces contraintes, le contexte marocain offre un fort potentiel de développement, notamment
à travers la collaboration entre universités, entreprises privées et institutions publiques. Enfin, un
investissement accru dans la recherche et le développement de solutions d’IA adaptées aux réalités
locales pourrait jouer un rôle déterminant pour moderniser l’agriculture marocaine et en améliorer
la productivité de manière durable.

‘’La COMADER milite aussi pour des subventions ciblées sur les pratiques vertueuses (ex : irrigation
économe, utilisation de l’énergie solaire, fertilisation bio, …)’’


Quel est l’impact des dernières précipitations sur la campagne agricole en cours ?


Le Maroc traverse l’une des crises hydriques les plus sévères de son histoire. Autrefois perçue
comme une ressource abondante, l’eau est désormais au cœur d’un stress hydrique structurel,
menaçant la sécurité alimentaire, le développement économique et la stabilité sociale.
Les dernières précipitations survenues, durant ces deux derniers mois, ont apporté espoir et répit au
milieu rural, néanmoins les bénéfices immédiats, restent inégaux selon les zones et les cultures,
notamment en termes de réhydratation des sols et reconstitution des réserves en eau, l’amélioration
des perspectives de croissance pour les cultures déjà semées (céréales, légumineuses, etc.), la diminution du stress hydrique pour les arbres fruitiers, les incidences positives sur la production et
les prix des cultures maraîchères et surtout l’impact remarquable sur les pâturages et l’élevage.


Toutefois, des défis et risques potentiels sont à prendre en considération, notamment le risque de
maladies et de ravageurs favorisés par l’humidité, l’impact sur la qualité des récoltes si les
précipitations sont excessives pendant la période de maturation, la nécessité d’ajuster les pratiques
agricoles (fertilisation, traitement phytosanitaire), la disponibilité des facteurs de production à des
prix raisonnables et une gestion des ressources en eau (irrigation) pour optimiser les bénéfices des
précipitations.


C’est dans ce sens que la COMADER recommande à ce que des mesures d’accompagnement et
d’appui à nos agriculteurs soient d’une grande importance, notamment la poursuite du soutien des
agriculteurs pour qu’ils puissent réussir la suite de la campagne agricole, l’accompagnement des
agriculteurs par l’information et le conseil agricole et la promotion des bonnes pratiques agricoles
durables et adaptées au contexte climatique.

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