
C’est le désert le plus grand, le plus chaud et le plus sec au monde: le Sahara. Sauf qu’aujourd’hui, la science nous apprend qu’il ne l’a pas toujours été… et qu’il ne le sera pas non plus nécessairement à l’avenir.
Il y a environ 12’000 ans, dans un climat plutôt humide, le Sahara, le désert connu actuellement pour ses extrêmes de température et d’aridité, pour son hostilité à la vie et pour son gigantisme – il est presque aussi grand que l’Europe continentale – était un paradis verdoyant, où l’on chassait les lions et les autruches et où prospéraient des sociétés complexes.
Une image qui semble incroyable. Un peu comme imaginer Mars avec des plantes et des arbres, traversée par un réseau dense de ruisseaux et de rivières, parsemée d’étangs et de lacs.
Cette « Période humide africaine », comme elle est appelée parfois, a duré des milliers d’années, démarrant vers le 10e millénaire avant J.-C. et s’achevant entre 5000 et 3500 avant J.-C. Un intense épisode de sécheresse, autour de 3900 avant J.-C., est souvent utilisé comme balise pour marquer la fin de cette époque verdoyante, même si, évidemment, les chronologies restent différentes suivant les régions de cet immense territoire.
Des communautés prospères et culturellement avancées
Les archéologues, les paléontologues et les climatologues ont pu décrire le climat, l’environnement et les communautés humaines à l’époque du « Sahara vert ».
C’était un environnement de type savane, alimenté par des précipitations de plus de 500 à 600 millimètres par an. A titre de comparaison, aujourd’hui, dans la même région, il n’en tombe que 50 millimètres. Cette pluie a permis le verdissement du territoire et la colonisation par des communautés humaines sahariennes.
Différents groupes ethniques se sont succédé ou ont cohabité dans un environnement riche et productif. Les communautés pratiquaient l’élevage bovin, étaient maîtres des techniques céramiques et ont laissé d’extraordinaires témoignages d’art rupestre.
En bref, le Sahara vert fut le berceau d’une civilisation très avancée pour son époque et marqua la transition de communautés nomades de chasseurs-cueilleurs vers des communautés sédentaires vouées à l’élevage et à la culture. De facto, le territoire saharien s’insère dans la longue histoire de la révolution néolithique, qui a vu une mutation décisive du comportement social de l’espèce humaine.
L’alternance entre le désert et le Sahara vert
En Algérie actuelle, les peintures rupestres du plateau du Tassili n’Ajjer, peintes vers 3000 ans avant J.-C., racontent un changement climatique inexorable et puissant, qui a poussé les populations à abandonner l’élevage bovin, très gourmand en eau, au profit de l’élevage caprin et ovin et à entreprendre le nomadisme à la recherche de sources d’eau.
Cette adaptation de l’activité pastorale a été un excellent moyen de s’adapter à un climat desséchant, toujours d’actualité aujourd’hui. A cette époque, trouver le précieux liquide pour soi-même et ses troupeaux devient une véritable obsession pour les sociétés sahariennes.
Il s’agit de la « dernière » période connue de Sahara vert. Cette région aurait en effet vécu des dizaines de périodes similaires, s’étalant sur plusieurs millions d’années. L’alternance entre les phases désertiques et les phases plus humides du Sahara est aujourd’hui un phénomène connu des scientifiques.
Tous les 21’000 ans environ, la région passe d’un Sahara vert à un désert. Cette cyclicité est liée aux paramètres orbitaux de la planète Terre, les « Cycles de Milankovitch », bien connus des climatologues. La variation de ces paramètres modifie le rayonnement solaire et les précipitations au Sahara.
Ce phénomène s’est déjà produit quelque 250 fois. En théorie, le Sahara devrait redevenir vert dans environ 10’000 ans, à condition que l’activité humaine ne perturbe pas l’ordre naturel à travers une modification trop importante des conditions environnementales et climatiques.
Une histoire pour le présent
La conviction de tous les scientifiques qui étudient le Sahara est que les découvertes effectuées sur les changements dans le passé du Sahara pourraient aider les humains à se préparer face aux défis de l’avenir. Cette histoire offre les témoignages de personnes qui ont vécu des changements climatiques d’une ampleur similaire à ceux observés actuellement.
Le passé du Sahara montre à quel point le changement climatique est puissant et difficile à gérer, car, malgré leur énorme capacité d’adaptation, les peuples du Sahara vert ont pratiquement disparu. La métamorphose du Sahara au cours des millénaires est l’une des illustrations les plus fascinantes de la relation entre l’espèce humaine et son environnement.
Il demeure une problématique à laquelle les chercheurs et chercheuses ne pourront cependant jamais répondre au sujet du Sahara vert. L’espèce humaine sera-t-elle capable d’en tirer des leçons pour affronter un avenir caractérisé par des changements tout aussi drastiques, mais beaucoup plus rapides?
Rts
