EntreprisesLa Une

Bank of Africa : Pourquoi la banque islamique ne décolle-t-elle toujours pas ?

Mauvaise stratégie de développement, crise de liquidité ou absence d’un marché porteur ? Pourquoi la banque participative du Groupe Bank of Africa peine-t-elle toujours à sortir de sa zone déficitaire et à retrouver le vert , à l’instar de certaines de ses consœurs ?

Lancée en décembre 2017, Bank Al Karam (anciennement BTI Bank – Bank Al-Tamweel Wa Al-Inma) continue de peser lourd sur les comptes de sa maison mère.

Au titre de l’exercice 2023 (les chiffres de 2024 ne sont pas encore disponibles), la filiale a accentué sa contribution négative au Résultat Net Part du Groupe (RNPG), atteignant -30,6 millions de dirhams, contre -19,3 millions en 2022.

Bien que structurellement déficitaire, la filiale n’est pas restée inactive. Le top management a initié une réévaluation complète de sa stratégie, aboutissant à une restructuration jugée nécessaire pour tenter d’inverser la tendance.

Ainsi, en juillet 2023, BANK OF AFRICA a procédé à la reprise des parts détenues dans Bank Al Karam par Al Baraka Banking Group, devenant ainsi le seul actionnaire de Bank Al Karam.

Le redressement  passe aussi par une combinaison d’actions : réduction des coûts, optimisation des revenus, gestion des risques et renforcement du capital .  

En juin 2023, Bank Al Karam a procédé à une augmentation de capital de  70 millions dirhams, faisant passer son capital social de 450  à 520 millions dirhams, dans un contexte de marché marqué davantage par une appétence de la clientèle au financement qu’à la collecte de dépôts.

Au terme l’exercice 2023, Bank Al Karam a enregistré un PNB de 13,2 millions dirhams en hausse de 9% par rapport à 2022, suite à l’effet combiné de l’accroissement des produits bancaires et d’une hausse moins importante des charges bancaires, noté-t-on.

Le résultat net ressort, quant à lui, déficitaire à  -32,8 millions, moins important que celui affiché lors des exercices précédents, 2022 (-39 millions) et 2021 (-42,1 millions).

Le total des dépôts de la banque atteint 369 millions à fin 2022, contre  223,4 millions à fin 2021.

À ce titre, il convient de noter que parmi les freins au développement de la finance participative au Maroc figure le manque de liquidité.

D’ailleurs, les clients montrent un intérêt plus marqué pour le financement plutôt que de laisser leur épargne en dépôt.

En bref, Bank Al Karam n’a rien à envier à ses consœurs, logées à la même enseigne, puisque la banque islamique peine encore à s’imposer au Maroc. Pourquoi ?

Manque de compétitivité par rapport aux banques conventionnelles

Les produits bancaires islamiques (Murabaha, Ijara, Mudaraba, etc.) sont souvent plus chers que les crédits classiques en raison de coûts de structuration plus élevés. L’absence d’un marché financier islamique dynamique rend difficile le refinancement des banques participatives, ce qui limite leur capacité à proposer des offres compétitives.

Manque de diversification des produits

L’offre des banques islamiques marocaines est encore limitée. Certains services essentiels comme les dépôts rémunérés et les financements participatifs pour les entreprises sont peu développés.

Manque de sensibilisation et de confiance

Une partie de la population ne comprend pas bien les principes de la finance islamique. Certains clients doutent de la véritable conformité des banques islamiques aux principes de la Charia, ce qui freine leur adoption.

Contraintes réglementaires et fiscales

Les banques participatives doivent se conformer à des règles strictes imposées par le Comité Charia du Conseil Supérieur des Oulémas. Cela limite leur flexibilité par rapport aux banques classiques. La fiscalité sur certains produits islamiques (comme la Murabaha) est souvent plus élevée, car certaines transactions sont soumises à une double taxation (TVA sur l’achat et la revente du bien).

Manque d’un écosystème financier islamique complet

L’absence d’instruments financiers islamiques (marché interbancaire participatif, assurances Takaful bien développées, etc.) empêche une véritable intégration des banques islamiques dans le système économique marocain.

Domination des banques classique

Les banques traditionnelles marocaines sont bien ancrées et offrent des services complets avec des taux souvent plus attractifs.

Enfin, face aux freins structurels, réglementaires et économiques… le succès limité de la banque islamique au Maroc n’est que le reflet des expériences aux autres pays arabes.

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page