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Enseignement privé : Inadéquation entre incitations et objectifs

Le Conseil de la Concurrence a publié un avis relatif à l’état de la concurrence dans le secteur de l’enseignement scolaire privé au Maroc, suite à la demande du Président de la Chambre des Représentants concernant les règles de la concurrence dans les établissements d’enseignement privé. Ainsi, le secteur de l’enseignement privé au Maroc a drainé un chiffre d’affaires de près de 20 milliards de dirhams en 2019, avec un nombre total d’emploi de plus de 401.000 personnes.

La Direction Générale des Impôts a indiqué que les paiements d’impôts par les établissements scolaires privés ont dépassé un milliard de dirhams en 2018, dont une part de 96,58% payée par des personnes morales. Cette contribution se répartit comme suit : 291,62 millions de dirhams résultant de cotisation de l’impôt sur les sociétés, 669,38 millions de dirhams résultant de l’impôt sur le revenu et 74,51 millions de dirhams émanant de l’impôt sur la valeur ajoutée.

D’après  les  données  de  la  Direction  Générales  des  Impôts,  les  établissements  scolaires  privés  bénéficient de dépenses fiscales, qui se sont élevées à 124,59 millions de dirhams en 2019, dont 84,68% sont associés à des exonérations totales. Par rapport à la totalité des dépenses fiscales, on  remarque  que  l’enseignement  scolaire  privé  bénéficie  d’une  part  équivalente  à  0,46  %.

Inadéquation des incitations accordées avec les objectifs fixés

Bien que ces incitations traduisent une baisse des recettes de la Trésorerie Générale, et offrent aux établissements nouvellement créés, durant leurs premières années, la possibilité d’alléger leurs besoins en trésorerie, elles restent, du point de vue des professionnels, limitées et ne répondent pas aux exigences de la Charte National d’Education et de Formation au titre de son 18ème levier d’action pour l’enseignement privé. Il s’agit de l’article 165 de ce levier qui prévoit la mise en place d’un système fiscal pour une durée de vingt (20) ans et d’exonérations pour l’encouragement à la création d’établissements d’enseignement d’utilité publique qui investissent la totalité de leur surplus dans le développement de l’enseignement et l’amélioration de sa qualité.

Les  représentants  des  établissements  scolaires  privés  ont  lié  la  non-atteinte  de  l’objectif  fixé  pour l’année 2015 par la Charte, à l’impact limité des incitations accordées aux opérateurs dans ce  type  d’enseignement.  A  cet  égard,  la  proportion  de  l’ensemble  des  élèves  inscrits  dans  le  privé n’a pas dépassé, jusqu’à 2020, 14,58%, malgré le taux de croissance constaté au cours de la dernière  décennie  (5  points  environ).

Les  frais  d’assurance scolaires sont du ressort des établissements scolaires privés

En  application  des dispositions de l’article 10 de la loi 06.00 précitée qui stipule que « Les responsables des établissements d’enseignement scolaire privé doivent faire assurer l’ensemble de leurs élèves contre  les  risques  d’accidents  scolaires  dont  ils  pourraient  être  victimes  à  l’intérieur  de  leurs  établissements ou pendant le temps où ils sont sous la surveillance effective de leurs préposés. Les  tuteurs  d’élèves  doivent  être  informés  des  clauses  dudit  contrat  d’assurance  »,  les  frais  d’assurance scolaires sont du ressort des établissements scolaires privés et non des parents et tuteurs des élèves. En conséquence, le Conseil recommande aux services concernés de l’Etat de veiller à l’application stricte de la loi, tout en imposant l’obligation d’information des parents du périmètre de couverture des contrats d’assurance souscrits par l’établissement au profit de ses  élèves. 

En  contrepartie,  lesdits  établissements  peuvent  intégrer  ces  frais  d’assurance  en  tant qu’élément de leurs coûts.

Failles du cadre contractuel

Obliger les établissements scolaires à opérer sur la base d’un cadre contractuel avec les ménages,  répondant  aux  normes  de  contractualisation  transparent  et  contraignante  pour  les  deux  parties,  et  définissant  clairement  leurs  obligations,  notamment  les  aspects  liés  au  contenu et à la qualité des services rendus, et aussi aux ressources allouées pour prendre en charge les services objets de l’engagement. L’élaboration de ce modèle de contractualisation doit prendre en considération les conditions prévues par la loi n° 31.08 relative à la protection du consommateur, et garantissant le droit des familles au choix de services, à l’information et à la possibilité de se rétracter.

Textes relatifs aux avantages accordés aux établissements scolaires privés 

•  Le Code  générale  des  impôts,  prévoyant  un  ensemble  d’exonérations  fiscales  au  profit  des 

établissements  scolaires  privés,  y  compris : 

–  Impôt  sur  les  sociétés  :  les  établissements  scolaires  privés  bénéficient,  conformément 

aux  dispositions  de  l’article  6-II  (c-1°-c)  du  Code  précité,  pendant  les  cinq  (5)  premiers 

exercices  consécutifs  suivant  la  date  du  début  de  leur  exploitation,  d’une  imposition 

temporaire à taux réduits. Ces taux réduits sont appliqués conformément au tableau des

taux  progressifs  visé  à  l’article  19-I-A  de  ladite  Code.  Ces  établissements  bénéficient  de 

taux progressifs fixés à 10% si le montant du bénéfice net est inférieur ou égal à 300 000

DH, et au taux de 20% si le montant de bénéfice dépasse 300 000 DH, sachant que le que

le taux maximum de l’impôt sur les sociétés en vigueur, conformément aux règles de droit

commun, est fixé à 31 % pour le montant des bénéfices excédant 1 000 000 de dirhams.

–  Impôt  sur  le  revenu  :  Les  propriétaires  d’établissements  d’enseignement  privés  sont 

soumis, en leur qualité de personnes physiques, à l’impôt sur le revenu selon le régime du

résultat net réel, qui est un régime général. Cette catégorie de contribuables peut aussi 

choisir le régime du résultat net simplifié selon les conditions prévues par le Code Général

des  Impôts.  Ces  établissements  sous  la  propriété  de  personnes  physiques,  bénéficient 

d’une  imposition  temporaire  au  taux  réduit  fixé  au  20%  pendant  les  cinq  (5)  premiers 

exercices  consécutifs  suivant  la  date  du  début  de  leur  exploitation,  conformément  aux 

dispositions de l’article 31-II (B-1-b) du Code Général des Impôts. Au-delà de cette période,

s’appliquent auxdits établissements les taux du tableau progressif de cet impôt prévu par

le  Code  Général  des  Impôts.  Il  convient  de  noter  également  que  les  salaires  versés  par 

ces établissements à leurs salariés sont soumis aux taux du tableau précité, alors que les

primes et indemnités provisoires ou non-provisoires versées aux enseignants ne relevant

pas de leur   personnel permanent sont soumises au taux spécial fixé à 17%. 

Impôt sur la taxe ajoutée :  la taxe sur la valeur ajoutée ne s’applique pas aux établissements

d’enseignement privé en ce qui concerne le chiffre d’affaires réalisé dans le cadre de leur

activité pédagogique au profit de leurs élèves. Par contre, ces établissements bénéficient,

conformément aux dispositions des articles 92-I-8° et 123-24°, de l’exonération de la taxe

sur la valeur ajoutée en interne et lors de l’importation des biens d’équipement à inscrire

dans un compte d’immobilisation, s’ils sont acquis pour une durée de 36 mois à compter la

date de l’exercice de l’activité. Sont exclus de cette exonération, les véhicules automobiles

autres que ceux réservés au transport scolaire collectif. Les mêmes établissements

bénéficient aussi, conformément aux dispositions de l’article 91-V-4°, de l’exonération de

ladite taxe pour les prestations de services afférentes à la restauration, au transport et aux

loisirs scolaires.

Mesures incitatives établies dans le cadre du régime général

Traitement des arriérés d’impôts ;

Exonération des droits de douane, conformément aux dispositions de Dahir n° 1.60.201

et Dahir n° 1. 60.202, promulgués le 14 joumada I 1383 (3 octobre 1963), portant adhé¬sion

du  Maroc  à  l’accord  pour  l’importation  d’objets  de  caractère  éducatif,  scientifique  ou 

culturel,  et  visant  à  faciliter  la  circulation  inter¬nationale  du  matériel  visuel  et  auditif 

de  même  caractère,  conformément  aux  objectifs  de  l’Organisation  des  Nations  Unies 

pour  l’Education,  la  Science  et  la  Culture.  Il  est  à  noter  que  cette  exonération  concerne 

l’importation d’outils et de moyens, non fabriqués localement, à des fins pédagogiques à

l’usage  des  établissements  d’enseignement  ; 

■ Suppression du droit appliqué aux établissements scolaires privés et dans le cadre de la

loi relative à la fiscalité des collectivités locales ;

■  Mobilisation  des  tous  les  moyens  pour  permettre  aux  établissements  d’enseignement 

scolaire privé de bénéficier de tous les programmes de promotion d’emploi ;

■  Permettre  aux  établissements  scolaires  privés  d’accéder  aux  lignes  de  financement 

disponibles dans le cadre de la coopération bilatérale pour la mise à niveau des petites et

moyennes  entreprises  ; 

■ Possibilité de faire bénéficier gratuitement le personnel de l’enseignement scolaire privé

de sessions de formation et de formation continue dans les centres publics de formation.

▶ Mesures incitatives établies dans le cadre du régime particulier

■  Permettre  aux  investisseurs  dans  le  secteur  de  l’éducation  et  de  formation  d’accéder 

au foncier public disponible et destiné à la construction d’établissements privés

d’enseignement et de formation, y compris les terrains sous la propriété de promoteurs et

d’opérateurs  publics  ;  

■ Appuyer la réalisation par les investisseurs, d’infrastructures éducatives et de formation

programmées  sur  les  terrains  domaniaux  ou  sous  la  propriété  privée,  dans  le  cadre  de 

documents  d’urbanisme  approuvés  ; 

■  Mise  en  place  d’un  mécanisme  de  financement  commun  entre  l’Etat  et  les  banques 

en  vue  de  soutenir  les  projets  de  création  ou  d’extension  des  établissements  privés 

d’éducation  et  de  formation,  basé  sur  : 

− Une contribution de l’État, qui s’élève à 30 % de la valeur de l’investissement, assurée  sous  forme  d’un  prêt  accordé,  à  partir  des  ressources  du  Fonds  de  Promotion  de  l’Enseignement Privé (FOPEP), qui est financé par des dotations du budget général et géré par la Caisse Centrale de Garantie (actuellement Banque publique de l’entreprise), et ce dans la limite de cinq (5) millions de dirhams au taux d’intérêt préférentiel pouvant aller jusqu’à trois (3) % par an pour une durée de remboursement pouvant aller jusqu’à douze (12) ans, avec un délai de grâce pouvant aller jusqu’à quatre (4) ans ;

− Un prêt bancaire couvrant 40% de la valeur de l’investissement ;

− Un autofinancement de 30% de la valeur d’investissement.

Toutefois,  il  y  a  lieu  de  souligner  que  dans  le  cadre  de  la  refonte  du  dispositif  d’aide  aux  financements  publics,  géré  par  la  Caisse  Centrale  de  Garantie,  ce  mécanisme  a  été  supprimé  en  2019.

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