Réussir son projet E-commerce à l'export
- Par Jean-Michel Huet associé chez BearingPoint
Le E-commerce est un formidable moyen pour développer son activité économique pour une entreprise. Il permet notamment de toucher une population plus grande et donc d’accroitre sa zone naturelle de chalandise. À l’export, cela peut être un vrai atout pour une entreprise en favorisant une augmentation des ventes sans avoir besoin de faire des investissements lourds sur place (bail commercial, embauche locale, etc.) qui peuvent être un frein notamment pour une PME. C’est un moyen aussi de faire vivre les marques au-delà de son territoire de naissance. Amazon a même développé toute une ligne de services en proposant aux PME et TPE de faire leur vente export sur sa place de marché en leur permettant ainsi de bénéficier de son audience mondiale de 300 millions de clients. Contrairement à une idée reçue, les PME sont encore loin d’être majoritairement converties au e-commerce. Selon l’indice relatif à l’économie et à la société numériques (DESI, pour Digital Economy and Society Index) pour l’Union européenne (à 28) seule une PME sur cinq a recours à l’e-commerce et moins de la moitié d’entre elles à l’export ! La marge de progrès est donc considérable. Mais le résultat est là et pour celles qui franchissent le pas, il s’agit souvent d’un relai de croissance important, voire essentiel. Il y a cependant 3 erreurs à ne pas commettre quand on se lance dans le e-commerce à l’export.
La première est l’erreur la plus connue, celle qui terrorise aussi les grands groupes depuis plus de 20 ans, c’est le conflit de canal. Se lancer dans le e-commerce c’est bien, mais il ne faut pas pour autant se couper de ces commercialisateurs traditionnels … Or ceux-ci peuvent ne pas apprécier que l’entreprise aille sur le e-commerce directement. Il faut donc préparer le terrain et notamment proposer une offre différente (service additionnel, conditions de livraison, service après-vente) qui permet de gérer ses différents canaux (le e-commerce en devenant un) en parallèle. À ceci s’ajoute la vigilance sur le fait de ne pas être dépendant d’une place de marché quand on décide de passer par ce canal. La dépendance économique peut vite devenir un danger mortel.
« Développer le e-commerce c’est souvent passer du B2B au B2C, or cela n’est pas si évident, car les codes (communication, paiement, etc.) ne sont pas les mêmes »
La seconde erreur c’est de négliger qu’en faisant du e-commerce l’entreprise passe au B2C … Or 85% des entreprises font du B2B. Développer le e-commerce c’est souvent passer du B2B au B2C or cela n’est pas si évident, car les codes (communication, paiement, etc.) ne sont pas les mêmes. Et en cas, souhaitable, de succès il faut savoir gérer la multiplication des demandes. Ce passage au B2C est bien sûr l’un des avantages, par la désintermédiation, du e-commerce, mais encore faut-il assurer ensuite. Pour certaines entreprises le choc est encore plus grand, car il s’agit de passer de la vente de produits à des offres de services avec souvent des modèles économiques différents. Là encore c’est un vrai atout pour les revenus, mais aussi un challenge en termes de modèle opératoire. La troisième erreur est, elle, renforcée par la dimension exportation, c’est de bien intégrer (prix, conditions générales de vente, etc.) toutes les difficultés inhérentes au fait de faire de la vente par internet. A fortiori en Afrique, les difficultés sont nombreuses : gestion des langues, des monnaies, des taxes (TVA, retenue à la source, frais douanier, etc.), des douanes pour le matériel, des questions logistiques maritimes ou terrestres. C’est bien sur le défi le plus important … autant certains sont faciles (les langues peuvent se gérer même s’il peut y avoir des complexités liées aux points d’accès IP dans certains pays notamment en Afrique) d’autres sont de vrais casse-têtes – les questions monétaires, fiscales et logistiques notamment.
Sur le chemin critique d’un tel projet, il faut ajouter aussi deux dimensions essentielles tout au long de la mise en œuvre et de la réalisation. D’une part, oublier l’idée que le e-commerce c’est gratuit. Bien sûr il permettra de proposer de belles opérations par des prix de transactions moins élevés, mais développer un site de e-commerce et surtout le faire vivre (animation, mise à jour, référencement, etc.) est un cout qu’il faut anticiper dans le business plan. Le e-commerce ouvre des portes, mais dans un contexte très concurrentiel ! Et on arrive là à l’autre dimension clé : le e-commerce en export permet d’ouvrir un champ d’opportunités qui ne s’arrêtent jamais et donc il faut derrière assumer de pouvoir gérer cette place de vente avec aussi ses difficultés propres (e-réputation associée, liens avec les réseaux, déclinaison technique sur mobile pour les pays émergents, etc.) L’export par le e-commerce est déjà et sera encore plus demain un incontournable, mais l’entrepreneur sérieux ira en tenant compte des spécificités liées à ces opportunités.