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Psychologie: Apprendre à dire non!

PAR Mohcine Benzakour,

Psychologue, Médiateur et Conseiller

 

« Si vous avez l’impression de vous sacrifier, d’aller contre votre volonté, vous devez refuser »

Les personnes qui ne savent pas dire non sont généralement celles qui ont besoin d’être entourées, de sentir qu’on les aime. Or, dire non peut être positif et parfois même nécessaire. Si vous n’êtes pas d’accord avec les méthodes ou les stratégies employées par vos supérieurs hiérarchiques ou si vous ne pouvez pas vous occuper d’un dossier supplémentaire, le mieux reste d’en parler à votre « N+1 ».  Les managers ont besoin d’avoir un feedback sur ce qui va et ce qui ne va pas. Du moment que vous apportez des éléments factuels et constructifs pour justifier votre désaccord, ils apprécieront. Il y a des règles pour apprendre à dire non, cela peut s’apprendre à l’extérieur du travail comme au bureau, parmi elles:

Confrontez-vous à vos peurs

La méthode pour dire non à votre chef ou à vos collègues reste la même. Seuls les enjeux et les craintes sont différents. Lorsqu’il s’agit de votre supérieur, c’est la peur de perdre votre travail qui surgit, tandis que face à un collègue, vous craignez d’altérer votre relation et d’engendrer une mauvaise ambiance de travail.  Ces risques sont réels, mais souvent surestimés. Et ceux qui ont atteint des positions hiérarchiques intéressantes dans l’entreprise, ainsi que les collègues qui sont appréciés, sont ceux qui n’ont pas eu peur de dire non. En ce sens, dire non n’est pas un défaut, mais bien une qualité. Pour vaincre cette peur, le mieux reste de s’y confronter. Et cela commence par des exercices simples à pratiquer au quotidien. Oser dire non se travaille tous les jours pour ne pas tomber dans la soumission et la victimisation. Vous pouvez, par exemple, entrer dans un café et demander un verre d’eau. Si votre boulanger vous donne une baguette trop cuite, vous pouvez aussi lui en demander une autre.

– Prenez votre temps avant de répondre

Pour éviter de vous laisser entraîner, malgré vous, à accepter des missions que vous ne pouvez pas gérer, ne soyez pas impulsif. Différez votre réponse. Il faut mesurer les conséquences sur sa charge de travail et faire le tour de ses besoins pour ne pas arriver au burn-out. Prenez le temps de réfléchir, même quelques minutes. Si vous êtes obligé de répondre dans l’immédiat, pour vous laisser du temps, réfléchissez à voix haute en reformulant la question posée, ses enjeux, les alternatives qui se présentent à vous et leurs conséquences. C’est une technique utilisée par les hommes politiques face à une question délicate.

– Affirmez-vous sans vous imposer

Dire non, c’est aussi s’affirmer en exprimant aux autres ses valeurs, ses opinions, ses émotions et ses limites pour les faire respecter. Cela suppose que vous soyez à l’écoute de vous-même et de vos besoins. Dire non, ça s’apprend. Parce que votre handicap n’est pas insurmontable, voici d’autres conseils pour vous aider à vous affirmer progressivement.

– Écoutez-vous

Votre collègue qui ne rend jamais ce qu’on lui prête vient encore vous demander s’il peut vous emprunter votre USB. Vous sentez alors monter en vous l’angoisse et la contrariété, car vous savez que si vous acceptez, vous ne récupérerez pas votre bien. Soyez donc attentif à ces sentiments qui vous envahissent, ils vous permettront de prendre la bonne décision. Si vous avez l’impression de vous sacrifier, d’aller contre votre volonté, vous devez refuser. De même, sachez quelles sont vos priorités et vos limites, et tenez-en compte avant d’accepter de rendre un service qui vous coûte.

– Prenez votre temps

Ne vous précipitez pas pour répondre à votre interlocuteur. N’hésitez pas à prendre le temps de la réflexion. C’est un bon moyen de lui signifier que ce n’est pas gagné d’avance, que sa requête vous pose problème. Vous ne répondrez pas sous la pression et vous pourrez ainsi réfléchir calmement à votre réponse, au lieu d’accepter sur le champ parce que vous ne savez pas comment lui dire non.

Cessez de vous justifier

« Non, désolée, je ne peux pas venir vous donner un coup de main chez toi samedi, je crois que je reçois ma famille » : qui n’a jamais inventé une telle excuse pour éviter d’embrasser l’autre.  Au risque de se mettre dans une situation délicate. Par peur de blesser l’autre, vous avez souvent tendance à vouloir justifier votre refus, comme si vous n’étiez pas convaincu de sa légitimité. C’est en quelque sorte une façon de plaider coupable, alors que vous êtes tout à fait en droit de dire non. Au lieu de mentir, ou de vous lancer dans des longs discours et de sombres explications, contentez-vous d’un simple « Non, je ne peux pas ».

– Prenez du recul

Ne culpabilisez pas ! Ce n’est pas parce que vous déclinez une invitation que votre ami sera blessé. Peut-être un peu déçu à la rigueur. Tâchez donc de comprendre et d’analyser ce qui est réellement en jeu dans votre relation, au lieu de dramatiser et d’imaginer le pire. Prenez conscience que votre entourage ne va pas vous rejeter et vous critiquer parce que vous n’êtes pas à leur service. Sachez d’ailleurs que les personnes qui ne savent pas dire non ne sont pas mieux perçues que les autres, bien au contraire.

– Usez de tact

Dire non, c’est bien, à condition de trouver le ton et la forme adaptée. Un non sec, brutal, énoncé avec agressivité sera forcément mal pris par votre interlocuteur. Exprimez-vous avec diplomatie et empathie : « je suis désolé, mais je n’ai pas le choix ». Votre refus s’en trouvera ainsi adouci.

– Tenez bon

Suite à votre refus, votre interlocuteur risque d’insister, de trouver mille et une bonnes raisons pour que vous finissiez par accepter. Ne vous laissez pas déstabiliser et influencer par ses contre-arguments. Soyez claire et ferme. Répétez votre refus aussi longtemps que nécessaire, sans chercher de nouvelles justifications. Il s’agit là de montrer que vous savez ce que vous voulez, et que vous êtes vous-même convaincue de votre non.

– Proposez une alternative

Si vous ne pouvez vous résoudre à dire non, cherchez une solution de substitution. Cela vous coûte de ramener votre collègue chez lui chaque soir, alors que vous pourriez le faire sans problème une fois par semaine ? Proposez-lui de le faire le jour qui vous arrange. Vous ne voulez pas passer votre samedi soir chez vos parents ? Invitez-les plutôt à déjeuner le dimanche midi. Vous faites ainsi preuve de bonne volonté, cela vous épargnera les cas de conscience et autres scrupules.

– N’abusez pas du non

Trop de non tue le non ! N’opposez pas systématiquement un refus sous prétexte que vous devez affirmer votre personnalité. Distinguez les situations où vous êtes en droit de dire non, et celles où refuser serait malvenu : par exemple lorsque votre collègue en instance de divorce vous demande de terminer son dossier en cours. Vous risqueriez de passer pour un individu égoïste et peu sympathique.

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